Le tripotage de notes a assez duré.

Depuis plusieurs années, les enseignants déplorent que les notes soient ajustées à la hausse pour gonfler les taux de réussite. Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, les a entendus. Il amendera son projet de loi sur les commissions scolaires pour y mettre fin, avons-nous appris. On ne peut que s’en réjouir.

Les enseignants dénoncent depuis plusieurs années le maquillage des notes. Ils subissent des pressions pour modifier leurs évaluations. Et parfois, la révision se fait à leur insu.

Ces pressions peuvent venir des parents voulant éviter un échec à leur enfant ou encore des directions d’école et des commissions scolaires voulant doper les résultats pour remplir les exigences du Ministère.

Cette dérive n’a rien de neuf, mais elle a été aggravée par la gestion axée sur les résultats instaurée dans la dernière décennie.

Certaines font pression auprès des enseignants pour gonfler les résultats et ainsi atteindre leurs objectifs. Les écoles et les commissions scolaires reçoivent des cibles chiffrées, par exemple pour les moyennes dans une matière ou pour le taux de diplomation. Certaines font pression auprès des enseignants pour gonfler les résultats et ainsi atteindre leurs objectifs. C’est une ingérence inacceptable dans leur travail.

En 2016, dans son essai Et si on réinventait l’école ?, M. Roberge dénonçait cette pratique. Il a essayé d’y mettre fin dans son projet de loi sur les commissions scolaires.

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge

Ce projet de loi est encore à l’étude. Depuis quelques semaines, on constate que l’article sur les notes gonflées est maladroit. Il permet au directeur de l’école, « après consultation de l’enseignant », de majorer le résultat d’un élève « s’il existe des motifs raisonnables liés à son cheminement scolaire ».

Le ministre croyait faire un gain en exigeant que cette pratique soit exceptionnelle et qu’elle se fasse en collaboration avec l’enseignant. Mais le problème demeurait : la direction d’école pouvait encore influencer l’évaluation, et même si elle devait consulter l’enseignant, cela ne signifiait pas qu’elle l’écouterait…

En commission parlementaire, plusieurs groupes ont dénoncé cet article. Le ministre Roberge les a écoutés.

En interview la semaine dernière avec notre collègue Hugo Pilon-Larose, M. Roberge se disait « ouvert à discuter et à réfléchir » à ce que les enseignants aient le dernier mot. Selon nos informations, il est encore plus convaincu aujourd’hui. Il compte déposer un amendement. Reste à en voir le libellé.

L’évaluation n’est pas une science exacte. Il est normal que des mécanismes d’appel soient prévus. 

Mais il est inacceptable que des gens qui ne sont pas enseignants s’ingèrent dans ce processus en vertu d’intérêts qui n’ont rien à voir avec l’apprentissage.

Un compromis envisageable serait de confier la révision à un autre enseignant qui, idéalement, ne travaille pas dans la même école. Bien sûr, même la meilleure loi ne pourra que réduire le risque. Et au-delà du tripotage, il existe d’autres pressions sur les enseignants qui ne disparaîtront pas avec la loi.

Par exemple, des enseignants pourraient encore être incités à orienter leurs cours en fonction des questions posées aux examens ministériels (teaching to the test), afin que les élèves obtiennent de bons résultats, même s’ils n’ont pas assimilé l’ensemble de la matière.

Reste que le ministre Roberge semble prêt à faire une avancée importante pour l’autonomie des enseignants. C’est une excellente nouvelle.

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