On peut croire que François Legault « n'avait pas le choix » de dégommer sa gênante ministre de l'Environnement, MarieChantal Chassé. Mais un premier ministre a toujours le choix de nier ses erreurs. Il peut se soucier d'abord de son parti, pour ménager un allié et sauver la face. Les précédents gouvernements l'ont d'ailleurs démontré à quelques reprises...

Donnons donc le mérite à M. Legault : il a eu le courage d'agir rapidement. Au lieu de s'entêter, il a arraché le diachylon d'un coup en délogeant Mme Chassé à peine 80 jours après son entrée en fonction. L'Environnement mérite un ministre qui donne au moins l'impression de comprendre ses dossiers. Mais ne nous illusionnons pas.

Ce mini-remaniement ne changera rien au fond du problème : les caquistes n'ont pas encore de plan pour protéger l'environnement et réduire les gaz à effet de serre. 

Pour y remédier, l'annonce d'hier ne suffira pas. L'initiative ne devra pas seulement venir du nouveau ministre de l'Environnement, Benoit Charette. Elle devra aussi provenir du sommet de la pyramide.

La politique est cruelle, et on ne veut pas s'acharner sur Mme Chassé. Elle n'aura jamais eu le temps d'apprivoiser son rôle et de maîtriser ses dossiers. Reste qu'on peut se demander si ce jour allait finir par arriver... Chacun de ses points de presse créait un malaise. Elle ne comprenait pas des sujets aussi fondamentaux que le marché du carbone et le Fonds vert. À chaque question, un précipice s'ouvrait devant elle.

Son successeur, Benoit Charette, est expérimenté, affable et diplomate. Même avec beaucoup de mauvaise foi, il est difficile de se chicaner avec lui.

M. Charette a pondu le plan caquiste pour le développement des transports collectifs. Il contenait de bonnes idées, comme le projet de tramway vers l'est de Montréal. Mais le document ressemblait à une liste d'épicerie. Les projets étaient énumérés dans le désordre. Il y en avait un peu pour plaire à tous, sans qu'on sache ce qui serait mis en priorité ou entamé dans un premier mandat. Le député de Deux-Montagnes y proposait aussi de relier les autoroutes 13 et 50. C'était une réponse aux maires de sa circonscription, qui voulaient élargir leurs parcs industriels, même si cela accélérait l'étalement urbain.

M. Charette hérite maintenant d'un ministère casse-gueule. Au Conseil des ministres, le responsable de l'Environnement est souvent perçu comme un empêcheur de polluer en rond.

M. Charette pourra profiter de son tact et de son expérience pour rallier ses collègues. Mais cela ne suffira pas. Il devra aussi avoir le courage de déplaire. Car plus que tout autre, l'environnement est un dossier pour lequel il faut penser au-delà du prochain horizon électoral.

Contrairement aux slogans de politiciens, l'environnement et l'économie ne vont pas toujours ensemble. Il faut parfois faire des choix difficiles. Lors de ces arbitrages, M. Charette aura besoin de l'aide de l'arbitre en chef. Du premier ministre lui-même.

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