Les commerçants montréalais sont en colère contre la hausse de taxes de l'administration Plante, et on les comprend.

La mairesse promettait de les aider, mais elle a fait le contraire. Son nouveau budget empire leur situation. Le secteur non résidentiel (qui inclut les commerces) subit une augmentation de taxe de 3,3 %. Cette hausse est supérieure à l'inflation, et supérieure aussi à la hausse pour le résidentiel.

Le taux de taxation non résidentielle était pourtant déjà plus élevé à Montréal que dans les autres villes québécoises et canadiennes. Cela explique une partie des problèmes de nos petits commerçants. Cela a été documenté en 2016 par un rapport d'expert commandé par la Ville.* Et cela a ensuite été reconnu par l'administration Coderre qui, dans ses deux derniers budgets, avait réduit leur taux de taxe par rapport à celui du résidentiel. La hausse du non résidentiel devait continuer de se limiter à la moitié de la hausse du résidentiel, et Projet Montréal était d'accord.

Cela explique la stupéfaction de plusieurs commerçants. Ils croyaient avoir une alliée à la mairie, mais ils se sont réveillés avec un obstacle de plus.

Bien sûr, les problèmes des commerçants de l'île ne s'expliquent pas que par les taxes. Si plusieurs en arrachent, c'est à cause d'une multitude de facteurs comme la concurrence de la banlieue, la concurrence du commerce en ligne ainsi que les travaux et la congestion.

Et si les taxes non résidentielles sont plus élevées à Montréal qu'à Toronto ou Vancouver, c'est aussi à cause de la vétusté des infrastructures et de la relativement faible densité de la population. Mme Plante n'est pas responsable de ce déséquilibre, mais elle peut et doit le réduire. Son administration, qui veut favoriser les milieux de vie et les commerces de proximité, a les moyens d'agir grâce à la Loi sur la métropole, adoptée l'automne dernier par Québec. Elle lui donne plusieurs nouveaux pouvoirs, entre autres en matière de taxation.

Pour en profiter, Mme Plante a demandé cette semaine au comité des Finances de la Ville de proposer une réforme de la fiscalité non résidentielle. Le comité pourra tester plusieurs propositions a priori intéressantes faites par Mme Plante en campagne.

En voici quelques-unes : 

- Aider les commerces directement touchés par les travaux - ça urge, car le chantier rue Sainte-Catherine vient de commencer

- Moduler le taux de taxation selon le secteur - par exemple, pour le secteur communautaire ou culturel

- Permettre aux petits commerces d'étaler le paiement des taxes

- Instaurer une taxation différenciée, avec un taux plus bas pour la tranche inférieure de l'édifice

- Adopter une approche « Robin des bois », comme à Québec, pour que les magasins des grandes enseignes contribuent proportionnellement plus que les petits commerces de proximité

- Calculer la taxe résidentielle en fonction de la valeur du loyer, et non de la propriété

Les petits commerçants sont majoritairement locataires. Ils ne profitent donc pas de la hausse de la valeur de l'édifice. Ils n'en récoltent que le désavantage, soit la hausse de taxes qui l'accompagne.

La Loi sur la métropole n'est en vigueur que depuis quatre mois, et Mme Plante est en fonction depuis moins de deux mois. On comprend qu'elle n'ait pas eu le temps de réformer la fiscalité. Mais c'est une bien mince consolation pour les commerçants. Ils retiendront surtout le recul de la mairesse par rapport à M. Coderre.

Pour eux, la seule certitude est que les choses vont empirer avant de mieux aller.

* Rapport du Comité de travail sur la fiscalité non résidentielle et le développement économique, présidé par la comptable Anne-Marie Hubert de EY

>> Lisez le rapport

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