Il n'y a rien de bien neuf à ce que les néo-démocrates veuillent se créer un parti au Québec. C'est même déjà arrivé, souvent.

Hier, La Presse+ a confirmé ce qui était anticipé depuis plusieurs mois : Pierre Ducasse, un ex-conseiller confidentiel de Jack Layton, lancera une aile québécoise du Nouveau Parti démocratique (NPD), dans l'espoir de présenter des candidats aux élections générales de 2018.

En scrutant un peu notre histoire, on constate toutefois que ce parti a déjà existé et que son descendant vit encore. Son nom : Québec solidaire.

Si on l'a oublié, c'est peut-être parce que le parcours du NPD-Québec fut tortueux.

Pour comprendre le défi d'un tel projet, il faut revenir sur ses échecs passés. Le NPD naît sur la scène fédérale en 1961. Une aile québécoise est ensuite créée, qui porte le nom de Parti social démocratique. Un schisme éclate peu après, qui mène à la fondation du Parti socialiste du Québec. Aucun des deux ne survivra à la fin des années 60.

En 1970 renaît une aile québécoise, cette fois sous le nom de NPD-Québec. Le parti sera tantôt indépendantiste, tantôt pour un fédéralisme renouvelé. Au milieu des années 80, le NPD-Québec connaît une brève et relative popularité, s'approchant de 20 % d'appuis dans les intentions de vote, avant de s'écraser à nouveau au début des années 90.

Après le référendum de 1995, il n'en reste que des miettes. Le parti change à nouveau de nom. La poignée de militants finira par se rallier en 2002 à l'Union des forces progressistes, qui à son tour fusionnera avec Option citoyenne pour créer Québec solidaire. Voilà pour l'arbre généalogique, rempli de diagonales et de ratures.

Le NPD-Québec n'a jamais su se démarquer suffisamment des autres partis sur l'axe gauche-droite ou sur la question nationale pour sortir de la marginalité. Le meilleur résultat de son existence : 2,42 % des votes, en 1985. Et 0 député.

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En théorie, on peut comprendre la résurrection du NPD-Québec. Des fédéralistes progressistes se disent orphelins. À leurs yeux, le PLQ ne serait pas assez à gauche alors que Québec solidaire le serait peut-être trop, en plus d'être indépendantiste.

Mais en pratique, le projet se bute à trois obstacles majeurs : sa désorganisation politique, sa différence plus faible qu'on ne le prétend avec d'autres partis, et enfin le mode de scrutin.

Le NPD-Québec proposerait le fédéralisme asymétrique, un peu comme la Coalition avenir Québec, mais avec des politiques sociales de gauche.

Or, cette position n'est pas si radicalement distincte de celle de Québec solidaire. En effet, même si le parti de Françoise David est indépendantiste, il proposerait une assemblée constituante avant d'organiser un référendum. La gauche viendrait donc avant le projet de pays. Cette idée avait d'ailleurs été proposée par le NPD dans les années 80, et comme Québec solidaire ne semble pas avoir de chances sérieuses de prendre le pouvoir en 2018, elle reste théorique. Mais un fédéraliste de gauche ne se sentirait pas à l'aise d'applaudir à un discours indépendantiste.

Peut-être que le NPD mise sur les possibles départs de Françoise David et d'Amir Khadir pour rebrasser les cartes à gauche. Mais pour le faire, le NPD devrait surmonter un deuxième obstacle, énorme : sa désorganisation totale. Au fédéral, le parti a perdu 75 % de ses membres depuis 2012, et aucun candidat québécois d'envergure n'a posé sa candidature pour la course à la direction. Il est périlleux d'ouvrir un nouveau front au Québec alors que le parti faiblit à Ottawa. Créer un nouveau parti est une tâche titanesque, qui requiert immensément de patience et de ressources.

Bien sûr, l'engagement politique est noble, et on doit reconnaître l'audace de ces militants. Mais pour l'instant, sous notre mode de scrutin qui défavorise les tiers partis, la création du NPD-Québec sert surtout de message au Parti libéral de Philippe Couillard : il ne doit pas oublier ses progressistes.

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