La poursuite du bonheur, c'est : 

La poursuite du bonheur, c'est : 

a) l'utopie inscrite par Thomas Jefferson dans la Déclaration d'indépendance des États-Unis ; 

b) une résolution pour 2041, après avoir remboursé ses dettes, quitté son emploi et acheté un chalet ; 

c) le nom d'un groupe de rock ontarien sous-estimé ; 

d) la journée international célébrée tous les 20 mars ; 

e) toutes ces réponses

Selon notre compréhension, la bonne réponse est e). Mais de façon plus pratique, on pourrait aussi soutenir que c'est un objectif que les gouvernements devraient viser, et que les citoyens devraient oublier.

Pour les élus, cela permet de repenser les politiques publiques. Mais pour les individus, c'est une quête fuyante. Comme pourchasser une feuille avec une souffleuse.

***

Pour évaluer la performance d'un pays, on s'est longtemps rabattu sur le PIB. Mais cet indice ne dit rien de la répartition de la richesse. Ni du bien-être. Il y a pourtant d'autres conceptions du progrès que de chiffrer à quel point on fait rouler l'économie, du berceau à la tombe.

Depuis quelques années, le bonheur est devenu un sujet d'étude sérieux. Les indices pour le mesurer se multiplient.

Parmi les plus connus : celui de l'OCDE et le Rapport mondial sur le bonheur de l'ONU, publié depuis 2012.

Ils cherchent à savoir si le bonheur fluctue entre autres selon l'âge, la richesse, le statut conjugal ou la religion. Et ils comparent les différences entre pays, entre citoyens d'un même pays et entre les périodes de la vie d'une même personne. Plusieurs tendances se dégagent.

L'argent fait le bonheur, un petit peu. Au-delà d'environ 75 000 $, le revenu n'influence plus le « bien-être »*. Il continue toutefois d'augmenter la « satisfaction ». En d'autres mots, après un certain seuil, le revenu ne change plus notre expérience ressentie au quotidien, car les besoins de base sont déjà comblés. Mais il améliore encore l'image de soi.

Le bonheur est aussi lié à la capacité de faire des choix. C'est-à-dire à l'accès à une santé et une éducation de base, essentiel pour être véritablement libre.

Ces données permettent aux gouvernements de mieux évaluer leurs décisions. Elles rappellent entre autres que c'est chez les plus démunis qu'un dollar investi aura le plus d'impact.

Bien sûr, on pouvait s'en douter. Mais un petit rappel est parfois utile.

***

Quand on regarde à la loupe, toutefois, l'image s'embrouille. Pour un individu, la poursuite du bonheur n'est pas une si bonne idée.

- Parce que ce n'est pas notre état normal permanent, comme le démontre la psychologie de l'évolution. Au risque de trop simplifier, les émotions négatives sont apparues en premier et elles sont parfois utiles, comme la peur pour fuir un prédateur.

- Parce que cela renferme sur soi, et qu'on s'y perd. La quête du bonheur laisse entendre que quelque chose nous manque. Et pour le trouver, on cherche mal. Selon le psychologue Daniel Gilbert, on surestime le bienfait de ce qu'on souhaite et le malheur de ce qu'on craint. Un exemple déstabilisant : une année après leur accident, les paraplégiques ne sont pas plus malheureux que le reste de la population.

- Parce que c'est un peu superficiel. Une expérience de pensée du philosophe Robert Nozick le fait comprendre. Il imagine une machine qui procure tous les plaisirs. Voudrait-on s'y brancher ou préférerait-on notre vie, avec ses embûches et emmerdes ? La réponse intuitive est de refuser.

Peut-être parce qu'il existe une chose plus grande que le bonheur ou le bien-être :  la dignité. C'est là une belle mission pour l'État : donner les moyens à chacun d'y parvenir.

Une telle mesure pose un évident problème de méthodologie. Il faut définir le bonheur et en trouver une mesure. Pour limiter ce biais, l'étude de l'ONU utilise une question simple et un vaste échantillonnage. Avec l'aide de la firme Gallup, on demande aux sondés d'évaluer leur vie sur une échelle de 0 à 10.

Qu'est ce qui contribue au bonheur ?

- L'âge : Le bonheur suit une courbe en « M ». De façon générale, il décline à la fin de la vingtaine, remonte à la fin de la quarantaine puis chute à nouveau vers 70 ans.

- Les relations : Selon une étude longitudinale réalisée de 1938 à aujourd'hui avec une même cohorte de diplômés de Harvard, la qualité des relations est le facteur le plus fortement lié au bonheur, et même à la santé.

photo associated press

Le Danemark se classe premier du Rapport mondial sur le bonheur 2016.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion