Les temps sont durs pour les sceptiques. Contester le réchauffement climatique causé par l'homme revient à nier un consensus scientifique. Alors ils se contentent d'en minimiser les conséquences ou ils quittent les faits pour se réfugier dans les abstractions sociologiques.

Pour ces adversaires d'un accord musclé à la conférence de Paris, l'environnementalisme serait devenu une religion. Un nouveau dogme pour notre siècle. L'attaque est grossière, car elle discrédite un mouvement en l'assimilant à sa faction la plus radicale, et qui devient aussi de plus en plus marginale.

Dans les années 70 naissait « l'écologie profonde », qui soutient que la Terre a une valeur intrinsèque. Elle devrait être protégée pour elle-même, que cela serve ou non l'humain. Toute perturbation des écosystèmes serait ainsi mauvaise. Cela ressemble à un commandement à respecter sans poser de question. C'est la théorie de maman Gaïa, qui fait de la planète une entité transcendant l'homme.

Or, aucun pays ou ONG ne la défendra à Paris. Si on y combat le réchauffement climatique, c'est parce que la science démontre qu'il menace à long terme l'avenir de l'humanité et qu'il tue déjà, avec les morts causées par le smog, les sècheresses ou cyclones. L'approche est ainsi anthropocentrique. C'est la protection de l'environnement par l'homme, pour l'homme. Difficile de trouver plus pragmatique.

Ces nouveaux ambassadeurs écolos portent la cravate et réfléchissent avec une calculatrice.

Ce sont par exemple le FMI et la Banque mondiale, qui veulent tarifier le carbone. La banque Citigroup, qui prévoit qu'un réchauffement de 2,5 degrés en 2060 coûterait 44 000 milliards de dollars. Ou la milliardaire fondation des frères Rockefeller qui se débarrasse de ses « actifs viciés » en énergies fossiles.

Motivations religieuses ? Plutôt rationnelles.

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Les monothéismes ont autant aidé que nui à l'environnement. On peut les invoquer pour soutenir que la création de Dieu doit être protégée ou utilisée par l'homme.

Il faut chercher ailleurs pour trouver une grande idée qui influence la lutte contre les perturbations climatiques. Cette idée, c'est notre rapport au temps. Notre propension au court-termisme pose en effet obstacle de quatre façons.

D'abord, en politique, où les décisions sont prises en fonction d'un cycle électoral de quatre ans. Ensuite, en économie, où des investisseurs sont obsédés par le rendement trimestriel. Aussi en psychologie, où plusieurs études démontrent que nous sous-estimons les risques à long terme. Et enfin, en histoire. Pour élargir l'analyse, il faudrait s'intéresser davantage à l'histoire naturelle. Ce récit scientifique nous apprend que l'humanité est un accident qui aurait pu ne pas arriver et que son avenir n'est pas écrit.

Nous tenons aujourd'hui le crayon. Comme le conclut Elizabeth Kolbert dans La 6e extinction, prix Pulitzer 2015 : « Nous sommes en train de décider, sans en être vraiment conscients, des voies évolutives qui resteront ouvertes et de celles qui se fermeront à jamais. »

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