Une candidate blâme en partie pour sa défaite les radios privées de Québec, allergiques aux dépenses de l'État. Peu après, la candidate reçoit des fonds publics pour étudier ces radios. Surprise, elle conclut à leur nocivité. Ces radios réagissent ensuite en criant au gaspillage. Retour à la case départ, donc.

Voilà toute l'ironie du rapport commandé par Pauline Marois à Dominique Payette, candidate défaite dans Charlesbourg redevenue professeur de journalisme à l'Université Laval.

Outre le casting, c'est aussi le mandat qui pose problème. Voulait-on évaluer la neutralité des animateurs ? Si c'est le cas, la réponse est déjà connue. Les stations examinées (CHOI, FM93 et NRJ) font dans l'opinion plus conservatrice, ce qui n'est pas en soi un tort.

Voulait-on comprendre d'où vient ce biais systématique ? Si c'est le cas, l'étude donne peu de réponses. Il aurait fallu une analyse socio-historique, ce que certains livres sur le « mystère Québec » ont déjà tenté de faire.

Voulait-on plutôt déterminer quand un propos devient intolérable, et proposer une solution ? Mme Payette s'y attaque sans vraiment convaincre.

On ne nie pas la gravité de certains dérapages. Radio X a bien sûr le droit de se moquer des cyclistes hivernaux. Mais faire un spécial « Honk a cyclist », en suggérant aux auditeurs de les frôler en klaxonnant, c'est menacer leur sécurité. D'autres exemples tout aussi dérangeants démontrent comment des polémistes crétinisent et empoisonnent le débat public, comme le souligne avec raison Mme Payette.

Des limites existent déjà. Il y a la limite juridique ; la loi interdit la diffamation et les discours haineux. Il y a aussi la limite règlementaire ; les radios privées adhèrent au Conseil des normes de la radiotélévision canadienne. Ce mécanisme d'auto-régulation est toutefois édenté. Mme Payette propose donc une mesure additionnelle : exiger l'adhésion au Conseil de presse, un tribunal d'honneur, qui imposerait désormais des amendes dissuasives. Or, c'est un bien petit bâton. Et en plus, il est mal utilisé à l'heure actuelle.

Le processus de plainte soulève lui-même des plaintes...

Aller plus loin exigerait de tracer la ligne entre ce qui déplaît et ce qui devrait être interdit. Et à cette question dangereuse, le rapport n'offre pas de réponse.

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Mme Payette entretient la confusion quand elle déplore l'omniprésence des idées de droite dans les radios privées. La militante progressiste peut s'inquiéter que des stations partent en campagne contre les régimes de retraite, et elle peut aussi, comme son rapport le suggère, favoriser des radios de gauche. Mais c'est une question politique, et non juridique.

Et encore là, le problème doit être relativisé. La gauche se plaint du diktat du commentaire de droite dans les médias, alors que la droite se plaint du règne de la bien-pensance progressiste.

La beauté de la pensée unique, c'est qu'il en existe plusieurs.

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