Justin Trudeau promet de renégocier les transferts en santé. Si la facture d'une province augmente à cause de la démographie, un élément indépendant de sa volonté, elle devrait être compensée. Sinon, un nouveau déséquilibre se creusera.

C'est ce qu'on conclut de la nouvelle étude des fiscalistes Luc Godbout et Suzie St-Cerny sur les transferts fédéraux. Il en existe trois types : la péréquation, les programmes sociaux et la santé.

Gagnant ou perdant, le Québec ? Cela dépend de la catégorie de transfert.

En péréquation, le Québec est favorisé. C'est ici que les versements en péréquation par habitant ont le plus augmenté depuis 20 ans. Cet avantage s'amenuise toutefois à cause du nouveau calcul adopté sous le gouvernement Harper.

Pour les programmes sociaux, le contraire s'observe. C'est au Québec que les versements par habitant ont le plus diminué, car ils ne sont plus pondérés en fonction des besoins (nombre d'étudiants ou d'assistés sociaux).

En santé, le portrait est plus nuancé. Les versements par habitant ont beaucoup augmenté au Québec (222 % depuis 1994). Mais cette hausse reste légèrement inférieure à la moyenne canadienne (241 %). Et surtout, les chiffres ne disent pas tout.

Dans les années 70, en vertu d'un calcul complexe, le fédéral remboursait la moitié des dépenses. Cela posait un problème d'efficacité, car on incitait les provinces à dépenser plus. Et cela posait aussi un problème d'équité, car les provinces plus frugales finançaient indirectement les plus dépensières.

On a ensuite basculé d'un extrême à l'autre. Le calcul est devenu simpliste, car il ne dépend désormais que du nombre d'habitants. Or, un aîné coûte près de cinq fois plus cher en soins. Les coûts augmentent donc plus vite dans les provinces grisonnantes comme le Québec ou la Nouvelle-Écosse.

M. Trudeau s'est engagé à renégocier les transferts en santé. Il faudra convenir d'une somme totale et d'une façon de la répartir entre les provinces.

Pour la somme, il n'y a pas de chiffre magique. Certains accepteraient une hausse annuelle égale à la croissance économique, comme le proposait M. Harper. D'autres souhaitent le maintien de la hausse de 6 %.

Certes, une hausse trop grande inciterait les provinces à dépenser encore plus en santé, alors que ces coûts explosent déjà. Mais une hausse limitée à la croissance économique apparaît insuffisante. Dépasser ce seuil est nécessaire, comme le démontrent deux rapports.

- Celui de l'Institut du Québec**, qui prévoit que même avec des réformes ambitieuses, les dépenses en santé continueront de croître plus vite que l'économie.

- Celui du Directeur parlementaire du budget***, qui prévoit que la dette nette d'Ottawa pourrait être éliminée en 2050, alors que celle des provinces grimpera. C'est un déséquilibre malsain pour la fédération.

Quant à la façon de répartir la somme, il y aura forcément des gagnants et des perdants. Un principe devrait guider cet arbitrage : l'égalité de capacité. Chaque province devrait avoir la capacité d'offrir des soins semblables. Pour cela, il faudra pondérer les transferts en fonction du vieillissement de la population.

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