C'est le budget de la croisée des chemins. Un électrochoc. Pour juger du remède, il faut se souvenir de la véritable maladie à guérir: le déficit structurel, et non le déficit sur une année particulière.

La cause est connue. Il s'agit du vieillissement de la population, qui freine la croissance économique et gonfle les dépenses. En 1971, le Québec comptait près de huit travailleurs pour un retraité. Ce ratio chutera à 2 pour 1 en 2030.

Le secteur de la santé compte déjà pour 45% des dépenses. Si rien n'est fait, cette part croîtra jusqu'à devenir insoutenable.

Le gouvernement Couillard a sorti le défibrillateur. Des compressions de six milliards seront administrées. Pour les adoucir, on aurait pu réduire le déficit cette année et ne l'éliminer que l'année suivante. Mais le retour à l'équilibre budgétaire est reporté depuis quelques années et n'a été atteint que six fois depuis 40 ans. La pression de cette cible était peut-être l'épée de Damoclès requise pour assainir les finances.

Le risque principal n'est pas tant d'étouffer la croissance économique; le budget l'estime à 2% pour les deux prochaines années. Québec profitera de la baisse du huard et du prix du pétrole, qui dopera les exportations. La contribution du plan de relance - une réduction légère et très graduelle du fardeau fiscal des particuliers et entreprises - sera par contre modeste.

Dans l'ensemble, Québec fait plus qu'équilibrer le budget. Il dégage un surplus. Cette somme est versée au Fonds des générations pour rembourser la dette. C'est après ce versement qu'on tombe à l'équilibre. À ce rythme, dans cinq ans, les ratios dette brute/PIB et dépenses/PIB reviendront au niveau d'avant la crise économique, une époque à laquelle le modèle québécois existait bel et bien. Cela permettra de réagir à la prochaine tempête. Voilà pourquoi le Parti québécois et la Coalition avenir Québec proposent le même échéancier.

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Ce défi titanesque comporte toutefois des écueils. Cette année, la hausse des dépenses sera de 1,5%, soit moins que la hausse naturelle des coûts (inflation, démographie, etc.) Il s'agit donc d'une baisse réelle.

En campagne électorale, le Parti libéral promettait de hausser les dépenses de 3,5% en éducation et de 4% en santé. Cette promesse était finalement aussi sérieuse que le fantasme de créer 250 000 emplois.

À court terme, l'éducation inquiète. Son budget n'augmentera que de 0,2% cette année avant d'être lentement rehaussé. Cette coupe vient sans projet précis de réforme.

À long terme, la santé préoccupe davantage. La réduction sera sévère: les dépenses croîtront de seulement 1,4 et 1,9% au cours des deux prochaines années. Or, l'Institut du Québec calcule que la hausse naturelle des coûts est de 5,1%. Il y a donc, comme en éducation, une diminution réelle des dépenses. Le ministre de la Santé a proposé quelques réformes pour y arriver, mais le défi demeure colossal.

Le retour au déficit zéro marque un «nouveau départ», a annoncé le ministre des Finances Carlos Leitao. Pour aller où? L'éducation constitue un des plus beaux projets de société, mais il ne faudra pas se créer des embûches en chemin.

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