La réforme du mode de scrutin n'émoustille pas beaucoup les Canadiens. Bien qu'il risque de rester périphérique, le débat sera ressuscité aux prochaines élections fédérales. Trois propositions sont sur la table: le statu quo (conservateurs), la représentation proportionnelle mixte (néo-démocrates) et le vote préférentiel (libéraux).

Aucun système n'est parfait, mais on connaît par contre le pire des trois. C'est le système actuel.

Mieux vaudrait le changer. Mais cela ne révolutionnera pas le Parlement, car notre mode de scrutin n'est pas responsable de tous les maux qu'on lui impute.

Certaines critiques du mode de scrutin sont pleinement justifiées. D'abord, il est inégalitaire. Un vote dans un château fort est souvent un vote perdu. Ensuite, il permet à un parti de régner sans partage, même s'il a parfois recueilli moins de 40% des votes. Et enfin, il encourage les clivages régionaux en récompensant les partis dont le vote est géographiquement concentré.

Le modèle néo-démocrate est celui qui règlerait le mieux ces problèmes. C'est aussi le changement le plus draconien.

Le nombre de circonscriptions diminuerait, et leur taille augmenterait en conséquence. Le lien entre le député et l'électeur risque de s'effriter. L'expérience allemande prouve toutefois que le problème reste marginal, nuance le politologue Louis Massicotte, de l'Université Laval. Des députés s'y partagent une région et s'investissent sur le terrain. Les citoyens profitent même de cette compétition.

En outre, ce système favorise l'élection de groupes sous-représentés (femmes, autochtones, etc.) et de gouvernements de coalition, qui écoutent leurs rivaux. Il y a par contre un risque, l'instabilité.

La solution libérale se positionne entre celle des néo-démocrates et le statu quo. Elle règle moins le problème de l'inégalité du vote, mais elle est plus simple à mettre en oeuvre. Les électeurs numéroteraient les candidats au lieu de cocher un seul nom. On tiendrait ainsi davantage compte des préférences de chaque électeur, tout en continuant d'élire des gouvernements stables.

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Libéraux et néo-démocrates voient aussi dans leur réforme un remède à l'hyperpartisannerie et au cynisme qui plombent le taux de participation. C'est exagéré. Aucun mode de scrutin ne transformera les élus en Calinours.

Et le problème ne se trouve pas dans la sélection des députés. Il réside plutôt dans leur surveillance, pour savoir s'ils méritent d'être congédiés aux prochaines élections. Pour faire ce travail, il faut reconstruire les contre-pouvoirs, qui s'érodent sous le gouvernement Harper.

Les solutions sont connues. Il faut par exemple libérer l'information, en cessant de museler les fonctionnaires et scientifiques, et en renforçant la Loi sur l'accès à l'information et la commission qui en gère les demandes. Il faut aussi cesser de mettre les bâtons dans les roues du directeur parlementaire du budget et de cacher des mesures controversées dans des projets de loi omnibus. Enfin, les chiens de garde des agences de renseignement doivent être fortifiés.

Avant de rendre les débats plus représentatifs ou civilisés, il faudrait empêcher le gouvernement de les étouffer.

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