L'industrie culturelle a encaissé des petits coups et coupes aveugles dans les dernières semaines, et la suture risque de ne pas tenir le coup. Il y a une solution réaliste pour réparer l'erreur, mais elle n'est malheureusement pas immédiate.

Il faut espérer que les commissions de révision de la fiscalité et des programmes suggèrent au gouvernement Couillard d'annuler l'année prochaine deux mesures : la baisse de 2 millions du financement annuel des musées, et la baisse de 20 % des crédits d'impôt en culture, dont l'inefficacité reste à prouver. Cet examen ne devrait pas être strictement comptable. Il devrait se faire en vertu d'un critère additionnel : l'exception culturelle.

Selon ce principe, l'État doit financer particulièrement la culture québécoise, car elle est source de sens et d'identité, et car elle est fragile. C'est ce qui explique d'ailleurs pourquoi le précédent gouvernement libéral avait fait bondir cette aide de 35 %.

Il faudra maintenant vérifier si les investissements coupés étaient rentables, ou nécessaires pour protéger ce qui compte, soit les artistes et leurs oeuvres. Car dans le brouillard actuel, on n'a qu'une certitude : elles feront mal à cet écosystème, déjà fragilisé par la nouvelle ronde de compressions à Radio-Canada.

Confier cette tâche aux deux commissions serait un compromis honorable pour le gouvernement Couillard. Et il est difficile d'en imaginer une autre, car le dentifrice est déjà sorti du tube.

Québec doit atteindre le déficit zéro en 2014-15. Or, le trou dans les finances publiques s'est creusé dans les derniers mois. Le nouveau gouvernement a été formé en avril. Il n'a eu que six semaines pour trouver l'argent et déposer un budget.

Cela a paru. Il y avait sûrement un ménage à faire dans les généreux crédits d'impôt aux entreprises, deux fois plus élevés que ceux offerts par l'Ontario. Peut-être que des changements sont nécessaires dans les crédits en culture pour s'assurer que l'argent serve à la création. Mais au lieu d'analyser la rentabilité de ces investissements et d'éliminer les mauvais, Québec a annoncé des coupes paramétriques de 20 %.

Un travail de moine serait nécessaire pour en mesurer par exemple l'impact sur l'industrie du doublage, les productions télévisuelles, la précarisation du travail ou la perte de tournages étrangers. Quant à l'aide aux musées, il s'agit non pas d'un incitatif fiscal, mais d'un budget annuel. L'effet est donc mesurable. Et il est clair : c'est peut-être la goutte de trop. Québec n'indexait plus son aide depuis les années 90. Il y a aussi eu d'autres coupes récentes. On arrive à une dangereuse spirale : moins d'argent, moins de qualité, moins d'affluence, moins d'argent... De plus, on punit même les musées qui ont amélioré leur efficacité, comme celui des Beaux-Arts de Montréal.

Mais Québec peut difficilement reculer maintenant. Cela ouvrirait la porte aux contestations des autres secteurs industriels. Et il reste encore plus de 3 milliards en compressions non identifiées à trouver d'ici la fin de l'année prochaine. La balle est dans le camp des deux commissions.

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