Les allergies alimentaires chez les tout-petits sont source d'angoisse et de culpabilisation chez les parents, qui nagent en pleine incertitude. Chacun voudrait faire en sorte de réduire le risque que son enfant développe une allergie, mais il n'existe aucune garantie sur la façon d'y parvenir.

C'est pourquoi la publication d'une étude, sérieuse et attendue, dans la plus récente édition du New England Journal of Medicine, revêt une grande importance. Pour la première fois, une étude révèle que l'exposition précoce et continue chez des bébés à risque a permis de réduire la prévalence de l'allergie aux arachides à l'âge de cinq ans.

Plus de 500 nourrissons, âgés de 4 à 11 mois au début de l'étude, ont pris part aux travaux qui se sont échelonnés sur plusieurs années. Les chercheurs ont scindé le groupe en deux cohortes: l'une a ingurgité des protéines d'arachides, à raison de six grammes par semaine répartis en trois repas, jusqu'à l'âge de cinq ans. L'autre n'en a pas mangé. Les résultats ont démontré que l'exposition aux arachides a permis de réduire de 70 à 86% le risque de développer une allergie.

Pendant longtemps, les médecins ont recommandé de retarder le plus possible l'introduction d'aliments allergènes comme les oeufs, les poissons ou les arachides chez les enfants à risque - ceux avec de l'eczéma sévère, des antécédents familiaux ou présentant une allergie alimentaire. La prévalence des allergies a pourtant bondi. En Occident, la proportion d'enfants allergiques aux arachides a ainsi doublé en dix ans, passant de 1,4 à 3%.

L'allergie aux arachides est l'une des plus graves, pouvant causer l'anaphylaxie, voire la mort. Elle est souvent inguérissable. Moins d'un enfant sur cinq verra son allergie disparaître à l'âge adulte.

Par ailleurs, la prévalence des allergies dans certains milieux où les enfants mangent des arachides précocement - notamment en Israël - est moins élevée. Ces observations ont incité le milieu médical à revoir les lignes directrices. Rien de sert de retarder l'introduction d'allergènes; on préconise de donner régulièrement de tous les aliments aux bébés dès l'âge de six mois.

Mais l'incertitude persiste pour les enfants à risque. Des parents sont hésitants, craignant de voir leur bébé faire une réaction allergique. Des médecins sont parfois mal outillés pour bien les informer. Même le Guide mieux vivre avec son enfant de la grossesse à deux ans, véritable bible des nouveaux parents, effleure à peine le sujet dans le chapitre sur l'alimentation qui vient d'être modifié.

Sans aucun doute, l'étude qui vient d'être dévoilée est prometteuse et suscite l'espoir. Des travaux supplémentaires - dont une seconde phase à l'étude - permettront de corroborer les résultats pour mener, éventuellement, à des lignes directrices claires. Pour l'instant, avant de s'empresser de donner à son enfant des cuillères de beurre d'arachides, une discussion avec son médecin demeure une avenue prudente.