Personne n'en doute, le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, pilote ses dossiers avec une assurance - certains diront une intransigeance - qui lui donne une allure de bulldozer. Il est temps pour lui de montrer son côté rassembleur.

Des réformes majeures comme celles proposées en santé suscitent des débats enflammés, corsés, voire même houleux, et c'est normal. Mais quand ils tournent à l'affrontement, ils deviennent contreproductifs. C'est la menace qui plane actuellement.

Trois dossiers sont sur la table: le projet de loi 10 touche les structures en abolissant les agences de santé; le projet de loi 20 a deux visées, soit d'améliorer l'accessibilité en forçant les médecins à prendre en charge et assurer le suivi de plus de patients en plus de réviser en profondeur le programme de procréation assistée; le projet de loi 28 entraîne une réduction des honoraires des pharmaciens.

Le ministre ne craint ni la controverse ni de brasser la cage pour atteindre son objectif ultime de soigner les maux qui minent depuis trop longtemps le réseau de la santé. C'est louable.

La menace de recourir au bâillon à ce moment-ci fait toutefois sourciller. Il est vrai que les élus semblent avancer à pas de tortue dans l'étude détaillée du projet de loi 10. On peut comprendre un ministre de vouloir poursuivre son objectif si un parti d'opposition fait systématiquement obstruction.

Le problème vient du fait que le ministre a évoqué dès le mois de novembre la possibilité de recourir au bâillon, soit avant même la commission parlementaire et qu'il multiplie les déclarations incendiaires. Malheureusement, la confrontation suscite rarement l'adhésion.

Si le gouvernement suspend le processus démocratique pour le projet de loi 10, qu'en sera-t-il pour le projet de loi 20, qui provoque bien plus de réactions houleuses?

Le Collège des médecins a lancé un appel au calme hier. Il demande au ministre plus de transparence, pas seulement sur la finalité des réformes, mais sur les étapes pour y parvenir, afin que tous aient une vue d'ensemble.

Il rappelle aussi aux médecins leur responsabilité collective : l'organisation des services et les choix personnels doivent se prendre en tenant compte de cette responsabilité qui incombe à la profession médicale.

Le Collège propose des solutions connues et endossées par plusieurs. Il sollicite la collaboration de tous pour les mettre en place. On revient au problème initial : la bonne volonté n'est pas suffisante, des garanties sont nécessaires. Il demeure inacceptable que la santé accapare près de la moitié du budget du Québec, mais que la population peine à voir un médecin.

Le projet de loi 20 a servi d'électrochoc. La négociation est maintenant la voie à emprunter pour obtenir les résultats souhaités. Pour cela, un changement d'attitude est nécessaire.