Brosser un portrait des urgences nous place devant l'évidence. L'hôpital devient le dernier recours des malades qui n'ont pas accès à un médecin. Pour espérer réduire l'achalandage aux urgences, il faut sortir des ornières et innover.

La Presse a dévoilé la semaine dernière des données inédites sur la durée moyenne de séjour aux urgences des patients ambulatoires, ceux qui ne sont pas malades au point de devoir être couchés sur une civière.

L'an dernier, entre le moment où ils ont été vus par une infirmière au triage et celui où ils ont obtenu leur congé des urgences, il s'est écoulé 4h22*. Il s'agit d'une moyenne pour tous les hôpitaux du Québec.

Les patients ambulatoires représentent les deux tiers des consultations aux urgences. La majorité d'entre eux ne sont pas des cas urgents. Ils consultent par exemple pour un mal d'oreille ou une foulure.

Ils pourraient être vus dans une clinique médicale. Mais le Québec est l'un des endroits au Canada où il est le plus difficile d'avoir accès à un médecin.

Le ministre de la Santé, le Dr Gaétan Barrette, affirme que la gestion des urgences passe par les groupes de médecine de famille (GMF) et les super cliniques promises par les libéraux.

Un coup de barre devra être donné pour y parvenir. Malgré le financement qu'ils reçoivent de Québec, à peine 45% des GMF respectent actuellement leurs engagements concernant les heures d'ouverture ou le nombre de patients inscrits.

Une analyse réalisée par le ministère de la Santé en février démontre également que les patients suivis dans un GMF sont plus susceptibles de se présenter aux urgences ou d'être hospitalisés que ceux suivis dans une clinique médicale. Il faut découvrir pourquoi.

Certaines innovations sont proposées, mais malheureusement, elles se butent rapidement à des chasses gardées. Les cliniques sans médecin que veulent mettre sur pied les infirmières, avec un projet-pilote qui vient de voir le jour à Québec, en sont un exemple.

Une infirmière qualifiée peut prescrire des antibiotiques pour traiter une otite ou faire le suivi d'un malade chronique. Elle évite ainsi des visites inutiles aux urgences.

Quand la Fédération interprofessionnelle en santé du Québec (FIQ) a lancé l'idée de ces cliniques, les médecins l'ont toutefois accueillie tièdement. Pourtant, le modèle existe en Ontario.

Les médecins ont du mal à jeter du lest pour déléguer des tâches. Des questions de financement et de hiérarchie médicale ne sont pas étrangères à cette situation.

Les urgences sont le miroir du réseau de la santé. Malgré les efforts pour désengorger les hôpitaux, les progrès sont limités et l'achalandage perdure. De nouvelles avenues doivent être explorées. Pour y arriver, il faut accepter de sortir des sentiers battus.

*Données pour 2013-2014