On se serait attendu à des ateliers pleins à craquer et des membres gonflés à bloc, hier, au congrès de Vision Montréal. L'administration Tremblay traverse une grosse tempête et les Montréalais doivent élire un nouveau maire dans six mois. L'ancien parti de Pierre Bourque ne peut rêver mieux pour amorcer la campagne électorale.

Or il n'y avait pas beaucoup d'atmosphère dans les corridors du congrès. Quelques centaines de personnes seulement s'étaient déplacées. En début de campagne, c'est peu. C'est à se demander si les membres de Vision Montréal croient vraiment que la mairie est à leur portée avec Benoit Labonté comme chef.

 

Le maire de l'arrondissement Ville-Marie semble incapable de profiter de la faiblesse actuelle du maire Tremblay pour mobiliser ses troupes. Il n'a pas l'autorité d'un chef. Les événements des derniers mois le confirment: depuis son arrivée à la tête du parti, une vingtaine de personnes ont quitté le navire. Et la journée d'hier s'est déroulée avec, en toile de fond, la rumeur qu'il y aurait eu un putsch avorté au sein du parti quelques jours seulement avant le congrès. Ce n'est pas bon signe. Bien qu'il soit normal qu'un changement de chef entraîne un changement de la garde rapprochée au sein d'une organisation politique, dans le cas de M. Labonté, le problème semble plus profond. Il a de bonnes idées mais on lui reproche toujours les mêmes choses: incapacité à travailler en équipe, manque d'écoute, etc.

Or pour être maire, ce n'est pas tout d'avoir des idées: il faut être en mesure de diriger, de déléguer, de faire confiance. Si M. Labonté en est incapable alors qu'il est seulement maire d'arrondissement, on est en droit de se demander comment il ferait s'il était élu à la mairie de Montréal. Il lui reste six mois pour renverser la vapeur et convaincre qu'il est vraiment l'homme de la situation, capable d'inspirer et de diriger une équipe et, surtout, une métropole.

L'autre problème de M. Labonté est un problème de personnalité: le chef de Vision Montréal n'a pas de charisme. Il ne dégage pas cette autorité naturelle qu'on observe chez certains politiciens, en particulier chez ceux qui aspirent à être chefs. Or sans cette assurance, sans ce leadership, il est très difficile d'être rassembleur. On n'a qu'à penser aux déboires de Stéphane Dion, un homme d'une grande intelligence qui n'avait, lui non plus, aucun charisme.

Un exemple: habituellement, dans un congrès, quand un chef entre dans une salle ou un auditorium, son arrivée s'accompagne d'un certain brouhaha. Hier, M. Labonté pouvait se déplacer sans problème, sans provoquer d'attroupement et sans faire tourner les têtes. La vraie vedette de la journée a été sans contredit Louise Harel, l'ex-ministre des Affaires municipales, venue parler de gouvernance (et qui a répété n'avoir aucune intention de se lancer dans la course...).

En fait, les délégués manquaient tellement d'enthousiasme qu'il aura fallu les appels dynamiques de la mairesse de l'arrondissement de Villeray-Saint-Michel, Anie Samson, pour secouer les troupes. «Sommes-nous en campagne électorale?» a-t-elle lancé aux membres amorphes venus entendre le discours de clôture du chef. «Je ne le sens pas.» Et elle avait raison.

Est-ce que l'assurance s'acquiert? Est-ce que M. Labonté saura, au cours des prochains mois, s'entourer de gens qui croiront vraiment en lui? Moins de 10% des Montréalais le connaissent, selon un récent sondage. À six mois des élections, le chef de l'opposition va devoir travailler très, très fort pour convaincre qu'il a ce qu'il faut pour prendre les rênes de Montréal.

nathalie.collard@lapresse.ca