La défaite du conservateur Michael Fortier, mardi dernier, est une mauvaise nouvelle pour Montréal. Au sein d'un gouvernement qui préfère discuter avec les provinces plutôt qu'avec les villes, le ministre Fortier était un atout. Il maîtrisait bien les dossiers montréalais et entretenait de bonnes relations avec les décideurs. Ces derniers vont devoir recréer des liens avec le gouvernement Harper nouvelle mouture. Ils auront avantage à se serrer les coudes pour faire entendre une voix unie à Ottawa car Montréal compte des dossiers majeurs qui impliquent la participation fédérale.

Ils ne sont pas les seuls dans cette situation. À Toronto aussi, on a boudé les Bleus. Résultat: les deux plus importantes métropoles canadiennes n'auront pas de représentants issus de leur territoire au Conseil des ministres. À un moment où les villes ont plus que jamais besoin de revoir leurs relations avec l'État, cette situation tombe on ne peut plus mal.

 

La situation précaire des villes n'est pas propre au Canada. On peut en effet parler de tendance mondiale. Un peu partout sur la planète, la population urbaine explose. À l'heure actuelle, environ trois milliards de personnes vivent en ville. Dans quelques décennies, on en comptera le double.

Or, les villes doivent non seulement assurer les services municipaux classiques - la collecte des ordures, l'assainissement des eaux, la propreté - mais elles doivent en outre dispenser des services en culture, en immigration et en logement. Et tout ça, sans source de revenus additionnelle.

Sous le gouvernement libéral de Paul Martin, le monde municipal bénéficiait d'une écoute attentive. Le premier ministre avait créé un Secrétariat des villes au sein de son ministère en plus de nommer un ministre d'État aux Infrastructures et aux Collectivités. Son premier budget comportait une redevance sur la TPS et son second, une redevance sur la taxe sur l'essence. On parlait alors d'un «New Deal» pour les villes canadiennes.

L'approche du gouvernement Harper est différente: bien qu'il ait prorogé la redevance sur l'essence, il a choisi d'incorporer le ministère des Infrastructures au ministère des Transports. Le poste de sous-ministre aux Infrastructures et aux Collectivités a quant à lui été aboli. Le premier ministre préfère s'adresser directement aux provinces et aux territoires. Et les villes représentent à ses yeux des trous financiers sans fond(s) dans lesquels il n'a visiblement pas envie d'aller se noyer.

Le défi des villes canadiennes au cours des prochains mois est simple: faire accepter l'idée d'un partage différent de la croissance économique. Pour assurer leur développement, elles ont besoin d'un financement stable et de longue durée. À plusieurs reprises au cours des dernières années, le maire de Montréal, Gérald Tremblay, a cité l'exemple du Festival de jazz pour démontrer à quel point ce partage (ou non-partage) est inéquitable. Alors que Montréal doit assumer les dépenses relatives à un tel événement - sécurité, propreté, etc. - c'est Québec et Ottawa qui récoltent les taxes des dollars dépensés sur le territoire montréalais. C'est cette situation aberrante qu'il faut corriger.