Pendant que les Américains vivent une campagne présidentielle mi-jupe mi-pantalon, la campagne électorale canadienne demeure obstinément complet-cravate.

À l'exception d'Elizabeth May, chef d'un parti qui demeure marginal, les femmes sont à peu près invisibles depuis le déclenchement des élections, dimanche dernier. Dans les bulletins d'information, les seules femmes qu'on aperçoit sont les compagnes des chefs de parti. En 2008, on s'attendrait à mieux.

Soyons juste, toutefois. Depuis 2006, la proportion des femmes candidates aux élections a légèrement augmenté. Il y a deux ans, plus du tiers (35%) des candidats du NPD étaient des femmes. Le parti de Jack Layton était suivi de près par le Bloc québécois (30,6%) et le Parti libéral (25,6%). Le Parti conservateur faisait piètre figure avec seulement 12,2% de candidates.

Deux ans plus tard, on compte davantage de femmes dans les quatre partis. Ils n'ont pas encore présenté tous leurs candidats mais à l'heure actuelle, c'est le NPD qui mène avec une proportion de 40% de candidates. Le Parti libéral, pour sa part, s'était fixé un objectif: recruter au moins un tiers de candidats féminins. Il a réussi et compte autour de 37% de femmes candidates, devant le Bloc qui en compte 32% (c'est à peine plus qu'en 2006). Les conservateurs, eux, n'ont même pas atteint les 20%.

Bref, c'est peut-être mieux qu'en 2006, mais ce n'est pas encore suffisant.

Les partis devraient tous imiter le Parti libéral et se fixer des objectifs de recrutement. Ils devraient également pousser leur démarche un peu plus loin en présentant des candidates dans des circonscriptions où ils ont de bonnes chances de l'emporter. Pendant longtemps, les femmes ont hérité de circonscriptions où elles étaient à peu près assurées de perdre. C'est moins systématique aujourd'hui mais si les principaux partis souhaitent vraiment que la composition de la Chambre des communes reflète plus fidèlement la réalité, ils devraient présenter des femmes dans des circonscriptions où elles ont de réelles chances de gagner.

Un groupe multipartisan en faveur d'une meilleure représentation des femmes en politique, Equal Voices, a fait l'exercice. Lorsqu'on étudie attentivement le potentiel des partis dans chaque circonscription, il n'est pas certain que le pourcentage de femmes élues au Parlement dépassera 21% au lendemain du 14 octobre.

Cette piètre représentation des femmes place le Canada au 51e rang des pays gouvernés démocratiquement. Il n'y a pas de quoi être fiers.

Certains se questionnent encore sur la nécessité d'avoir une représentation politique qui reflète la société. Un élu ne devrait-il pas représenter tous ses électeurs, qu'ils soient homme OU femme?

La réalité n'est malheureusement pas aussi simple. Dans ses nombreux ouvrages sur les femmes, la politologue Manon Tremblay a constaté que les femmes, lorsqu'elles accèdent au pouvoir, ont tendance à se sentir responsables de bien représenter les aspirations de leurs électrices. Bien sûr, elles ont plus de chances de défendre des positions féministes mais ce n'est pas un acquis. Un homme peut très bien défendre des principes féministes.

Si ce n'est que parce qu'elles portent un regard différent sur la vie, les femmes devraient représenter la moitié des dirigeants.