Le plus étonnant est que ça n'étonne plus. «En présence de besoins importants et de ressources limitées, on assiste dans plusieurs domaines à un écart qui se creuse entre l'offre de services théorique et celle réellement disponible sur le terrain,» juge la Protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain.

En clair, les gouvernements promettent (toujours davantage, d'ailleurs), mais ne livrent pas, quelle que soit leur étiquette politique.

Le rapport 2012-2013 de l'organisme voué à la défense du citoyen, contribuable, client et bénéficiaire de l'État couvre en effet une période où deux gouvernements, libéral puis péquiste, ont officié. Et cela ne change rien à l'affaire: les programmes de compression budgétaire se répercutent directement sur les services à la population.

C'est le phénomène que nous avons souvent évoqué dans cette colonne, l'assimilant à une rupture de contrat entre l'État et ses commettants.

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On ne sera pas étonné non plus d'apprendre qu'au cours de l'année écoulée, 1425 plaintes et signalements ont été logés en rapport avec les soins de santé et les services sociaux, soit 9% de plus par rapport à l'année précédente.

Les difficultés d'accès à ces soins et services comptent pour le tiers des appels au secours logés auprès de la Protectrice dans ce secteur d'activité gouvernementale. La liste des problèmes est sans fin. Soutien à domicile restreint au strict minimum. Difficulté persistante à trouver un médecin de famille. Déficiences des soins palliatifs. Délais pour des tests diagnostics, au sujet desquels la Protectrice du citoyen signale que, s'ils en étaient correctement informés, les citoyens pourraient se diriger vers des solutions de rechange, dont les... cliniques privées.

Tout cela mène fatalement (!) aux salles d'urgence, où on est toujours à espérer «une durée moyenne de séjour de 12 heures pour les usagers sur civière». Disons qu'il s'agit d'un objectif qui ne pèche pas par sa folle démesure...

Or, ce problème découle en partie - ce qui est également connu et avéré - du fait de l'occupation de lits hospitaliers par des personnes âgées en attente d'une place d'hébergement permanent dans d'autres institutions.

On notera au passage que, tant en ce qui concerne l'administration publique en général que la santé et les services sociaux en particulier, Montréal semble la plus mal servie si on en juge par la quantité de plaintes traitées. Administration générale: alors que la métropole compte 24,6% de la population du Québec, 37% des plaintes et signalements en proviennent. Santé et services sociaux: 30,1%. Une demi-douzaine de régions s'en sortent proportionnellement mieux, la Montérégie étant particulièrement choyée.

Certes, personne ne s'attend à des miracles.

Mais, en particulier dans ces secteurs les plus névralgiques, et les plus chèrement payés par les contribuables, on pourrait au moins s'attendre à connaître la vérité. Raymonde Saint-Germain estime ainsi que «les autorités doivent donner des indications claires sur les éléments essentiels du service qui seront préservés. Les citoyens sont en droit de savoir quels services sont réellement disponibles et quelles en sont les conditions d'accès, partout au Québec.»