Tout le monde semblait se résoudre, hier, à ce qu'une intervention militaire vise la Syrie. Cependant, demeuraient floues les intentions des uns et des autres. Qui dépassera les mots pour aller au casse-pipe? De quelle façon? Avec quel objectif? Avec quelle limite à l'action entreprise?

En utilisant l'arme chimique contre ses commettants (ce dont plus personne ne doute), Bachar al-Assad a créé une situation inextricable, sortie tout droit de l'enfer.

Son conseil de sécurité ligoté par la Russie et la Chine, l'ONU ne fera rien, ce qui n'étonne pas. Moscou et Beijing, sans parler de Téhéran et du Hezbollah, demeurent collés au régime al-Assad. Les nations et organisations supra-nationales dont la Ligue arabe, qui ont exprimé leur dégoût devant cette horreur, ou ne feront rien, ou attendent un signal.

On sait lequel.

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L'Amérique doit y aller, claironne The Economist: «Nous croyons que les États-Unis constituent de façon générale une force pour le bien dans le monde. Mais si M. Obama ne tient pas ses promesses (sa déclaration sur la «ligne rouge» que constitue l'arme chimique), cette force n'existera tout simplement plus».

Il est vrai que, quelques heures plus tard, le magazine britannique ajoutait sur son site web: l'affaire est horrifiante, «mais nous avons perdu toute confiance en notre capacité d'y faire quoi que ce soit»...

La situation ne peut être mieux résumée. Et c'est le doute qui nous a toujours habités, motivé par quatre faits.

Un. Le Moyen-Orient est une poudrière, on le sait. Quel effet aurait dans la région une telle intervention? Au Liban ou en Turquie, par exemple, nations déjà touchées par la terreur ou l'afflux de réfugiés?

Deux. Il est improbable qu'une intervention militaire améliorera le sort des Syriens dans un avenir prévisible. Ou même qu'elle sera bien accueillie. «Nous combattrons tout pays qui nous attaquera. Ce sont nos problèmes et c'est à nous de les régler», dit un Syrien, arme au poing (à la BBC Arabic). Afghanistan et Irak, ça rappelle quelque chose?

Trois. Identifie-t-on une succession fréquentable au régime al-Assad? Au sein des groupes rebelles dont on a perdu le compte, les djihadistes sont de plus en plus nombreux, tout comme les émissaires étrangers d'Al-Qaïda et les fonds d'une belle brochette de régimes autoritaires.

Quatre. Ceux qui, aujourd'hui, ordonnent à la police américaine d'intervenir l'enseveliront sous les injures, demain, lorsque la première bavure se produira. Et il y en aura forcément: un missile Tomahawk n'est pas un feu de Bengale et une division d'infanterie, pas un collectif citoyen. On verra alors resurgir, y compris à Montréal, les bonnes vieilles pancartes «Death to America».

Et personne, nulle part, ne sera plus avancé.

Jusqu'à maintenant le gouvernement Harper s'est montré prudent. Il faudra l'être encore. Et espérer qu'un miracle viendra de la diplomatie.