Nicolas Maduro, le dauphin d'Hugo Chavez, a gagné. Mais par à peine plus d'un point et demi de pourcentage. En réalité, cette courte victoire l'affaiblit personnellement, annonce de durs lendemains pour le chavisme et ne fera rien pour extraire le Venezuela des sables mouvants économiques dans lesquels il s'enlise.

Ce résultat est d'ailleurs contesté par son opposant, le centriste Henrique Capriles, qui a demandé un recomptage et appelé ses partisans à manifester. Ce qui a été fait au son des traditionnelles casseroles, l'affaire ayant assez mal tourné: on déplorait jusqu'à hier soir au moins sept morts et des dizaines de blessés.

Dans la confusion, les deux camps appellent maintenant à de nouvelles manifestations. Et il n'est pas certain que le nouveau président soit capable de maîtriser la situation.

Maduro n'est pas Chavez.

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«Les gens ont voté pour un mort», disait un citoyen de Caracas (à l'AFP) après l'annonce des résultats du scrutin. Ce fut en effet l'essence de cette joute électorale.

Maduro, 50 ans, un ex-chauffeur d'autobus et syndicaliste qui n'a ni envergure ni charisme, a manoeuvré sous l'aile protectrice de l'illustre disparu - et de La Havane. C'est plus qu'une image: il a affirmé au cours de la brève campagne électorale qu'un oiseau lui soufflait les conseils de Chavez, décédé le 5 mars dernier!

Cela serait plaisamment folklorique si l'avenir du pays n'était pas si incertain. Sans parler de la déchirure politique que met à jour le résultat du scrutin, des décisions économiques majeures - et qui feront mal - devront être prises.

Le problème est connu, documenté, incontournable.

Le régime socialiste vénézuélien a tenu jusqu'ici par la grâce du pétrole. Celui-ci a financé d'ambitieux programmes sociaux - soins de santé, alimentation, logement - qui ont assuré à Chavez l'appui des classes les moins favorisées. Le brut cédé à rabais lui a aussi procuré un réseau d'amis sur la scène internationale, Cuba étant le cas-type, tous ceux-là relayant la rhétorique anticapitaliste et antiaméricaine du Commandante, gonflant sa stature à l'interne.

Seulement, derrière cette façade, s'est lentement grippée la mécanique de l'économie réelle.

Aujourd'hui, le taux d'inflation est proche de 30%. Sur le marché noir, le dollar américain se transige à quatre fois le taux officiel (le bolivar a été dévalué de 32% en février). Des entreprises nationalisées fonctionnent à une fraction de leur capacité - l'aciérie Sidor, par exemple. Des produits de base sont périodiquement introuvables. Les coupures d'électricité se multiplient. Le pays importe le pétrole raffiné qu'il est incapable de produire. Et la criminalité est hors contrôle, ce qui serait malgré tout le principal souci des Vénézuéliens.

Mais ils pourraient désormais en avoir bien d'autres, et de plus pressants, si la situation dégénère encore.