Liberté d'expression: le thème est récurrent en ces temps de crise. Notamment en raison des abus qu'on fait de cette liberté et que, en fonction des intérêts supérieurs de la société, il faut tolérer. Même si c'est en grinçant des dents.

Or, en rapport avec ce sujet chaud, la Chambre des communes vient d'adopter - dans l'indifférence générale au Québec - un projet de loi visant à défaire un pouvoir de censure, littéralement, dont jouissait à ce jour un organisme paragouvernemental.

Cet organisme est la Commission canadienne des droits de la personne.

Son pouvoir lui était octroyé, en matière de liberté d'expression, par l'article 13 de la Loi sur les droits de la personne. D'abord destiné à pourchasser les communications téléphoniques haineuses (!), l'article 13 s'est bientôt étendu à l'internet. Puis à la majorité des médias, à peu près tous présents sur le web.

L'utilisation douteuse que faisait la CCDP de cet article de loi est demeurée longtemps ignorée par le public et même par la presse. Cela a duré jusqu'à ce que l'organisme commette l'erreur de s'en prendre, en 2007, à un géant de l'information, l'hebdomadaire Maclean's, et au journaliste Mark Steyn... finalement sortis gagnants de l'affaire après y avoir englouti une fortune.

Un an plus tard, le rapport Moon (du nom d'un professeur de droit de l'Université de Windsor) recommandait à Ottawa d'abroger l'article 13.

C'est chose faite aujourd'hui.

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Des critiques de toutes natures se sont accumulées au fil des ans contre ce processus parajudiciaire devenu une sorte d'industrie des droits. Une industrie notamment nourrie par un véritable plaignant en série (une douzaine de causes!), le militant Richard Warman, un... ex-employé de la CCDP.

Nonobstant cette troublante incongruité, les critiques les plus évidentes ont été de nature légale. Un, le Code criminel couvre le champ des propos haineux dont pourraient être victimes des groupes identifiables. Et deux, tout cet édifice reposait sur des procédures étrangères au droit tel qu'on le connaît dans les tribunaux dûment constitués.

Mais il y a plus grave.

On pouvait avoir la fâcheuse impression qu'un agenda politique était à l'oeuvre, tout comme dans quelques-unes des commissions provinciales prenant modèle sur la CCDP.

La haine raciale, ou religieuse, ou homophobe semblait en effet n'être générée, aux yeux de la Commission, que par des mâles blancs chrétiens, si possible obscurs et sans ressources... C'est devenu évident le jour où elle a refusé de se pencher sur le cas d'un imam montréalais auteur d'un manifeste (publié sur le web et publiquement dénoncé) à la fois violemment antisémite, homophobe et sexiste... véritable tiercé du propos haineux!

Personne ne regrettera l'article 13, sauf ceux qui avaient fondé sur lui une carrière. Ou un sacerdoce politique.