Les documentaristes Isabelle Clarke et Daniel Costelle récidivent dans la magistrale leçon d'Histoire. Ils offrent cette fois Apocalypse/Hitler, une biographie télévisuelle présentée en deux épisodes à l'antenne de Télé-Québec*. En 2009, ce sont eux également qui avaient livré la série Apocalypse narrant en six épisodes les péripéties de la Seconde Guerre mondiale, une série unanimement qualifiée d'oeuvre majeure.    

Tout le monde l'a dit et, néanmoins, c'est vrai: le travail de Clarke et Costelle (qui ont déjà collaboré avec un pionnier devenu un monument, Henri de Turenne, aujourd'hui âgé de 90 ans) est exceptionnel à tous les points de vue. Et qui plus est, il s'effectue à une époque où on n'est plus très certain que les jeunes soient mis en contact de façon cohérente - fut-ce transversalement... - avec l'Histoire. Or, connaître celle-ci est essentiel pour porter le début du commencement d'un jugement sensé sur les événements contemporains.

La télé, cet objet cordialement détesté par maints esprits éclairés, se trouve ici au croisement de la pédagogie, de l'intelligence et du nécessaire.

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Et ça ouvre l'appétit.

De fait, la même équipe de documentaristes prépare deux nouvelles séries sur la Première Guerre mondiale ainsi que sur la guerre froide, pour diffusion à compter de 2014. C'est bien. Mais avec un bémol. Après avoir été instruit en profondeur sur Adolf Hitler, on regrette de devoir quitter cette époque avant d'avoir été mis en contact de la même façon avec les autres grands chefs d'État qui eurent raison du nazisme.

À la longue, en effet, la fascination qu'exerce le Führer finit par être suspecte.

En France, Apocalypse/Hitler a remporté la guerre de l'audience (6,1 millions de téléspectateurs) lors de sa diffusion. En Allemagne, on s'apprête à rééditer Mein Kampf en extraits commentés, une initiative inédite depuis 1945... mais peut-on encore apprendre quoi que ce soit de cette prose?

Hitler fut un être médiocre qui, incarnant le Mal dans une forme presque absolue, accéda au pouvoir par accident, inventa le génocide industriel et mit l'Europe - y compris sa propre nation - à feu et à sang. Pour une part, on s'intéresse à lui comme on s'arrête pour regarder, par voyeurisme un peu malsain, un accident où il y a du sang - mais ce monstrueux accident-là faillit détruire une civilisation...

Est-ce qu'il ne serait pas au moins aussi nécessaire et intéressant de consacrer quelques heures de télévision à Winston Churchill, Franklin D. Roosevelt, Charles de Gaulle et Joseph Staline (même si le cas de ce dernier est beaucoup plus trouble)?

Ceux-là furent en effet les vrais géants, non seulement de la Seconde Guerre mondiale, mais du siècle dernier.

*Le premier épisode est rediffusé le mercredi 18 janvier, 13h00. Le second sera à l'antenne le dimanche 22 janvier, 20h00.