Sous-marins ou hélicoptères: l'achat de gros équipements militaires a toujours été un casse-tête pour Ottawa... C'est à nouveau le cas dans le dossier d'acquisition de 65 chasseurs F-35 de Lockheed Martin destinés à remplacer les F-18, un dossier ouvert sous Jean Chrétien en 1997.

Sous-marins ou hélicoptères: l'achat de gros équipements militaires a toujours été un casse-tête pour Ottawa... C'est à nouveau le cas dans le dossier d'acquisition de 65 chasseurs F-35 de Lockheed Martin destinés à remplacer les F-18, un dossier ouvert sous Jean Chrétien en 1997.

Presque 15 ans plus tard, l'état des lieux est en effet troublant.

Les coûts d'acquisition, d'entretien et de mises à niveau des appareils demeurent nébuleux, planant quelque part entre 14,7 et 29,3 milliards de dollars: quelqu'un a parlé de «cartes de crédit volantes»! Les caractéristiques du F-35 «de base» affichent des incompatibilités avec les tâches envisagées. Les retombées pour notre industrie aérospatiale pourraient être énormes, mais c'est sans garantie.

Cela étant, les libéraux de Michael Ignatieff déchireront le contrat s'ils accèdent au pouvoir, appuyés en cela par les bloquistes de Gilles Duceppe. Quant au néo-démocrate Jack Layton, il exige études et consultations préalables.

Il s'agira donc d'un enjeu électoral important.    

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Le dossier financier et technique du F-35 est d'une grande complexité. En outre, d'autres questions méritent d'être posées. Par exemple: le Canada a-t-il vraiment besoin de chasseurs? Et, si oui, d'une flotte coûteuse de 65 appareils de cinquième génération?

À cela, les militaires répondent: oui. Pour l'«occupation» du Nord, la défense du continent et d'autres missions éventuelles, sans parler de leur désir de conserver une expertise en cette matière. Rien de cela n'est futile. Mais l'époque et le rapport coûts-bénéfices doivent également influer sur la décision.

Ainsi, assumer une juste part des responsabilités au sein du NORAD, de l'OTAN ou dans des missions sous mandat de l'ONU n'implique pas que le Canada le fasse avec des avions de chasse. La spécialisation des tâches entre nations serait logique, envisageable et est d'ailleurs déjà existante.

Entrevoir les conflits du futur (ou autopsier l'opération afghane) indique que les chasseurs sont dorénavant moins utiles que les gros transporteurs, les hélicos, les drones. Et moins que l'expertise informatique ou même culturelle: combien de chasseurs «vaut» un seul militaire parlant le pachtou, l'urdu ou l'arabe?

Renoncer à l'arme nucléaire et aux porte-avions n'a pas empêché le Canada d'entretenir une Défense respectable. Comme l'a noté l'historien J.L. Granatstein dans Who Killed The Canadian Military?, c'est plutôt le mépris pour la chose militaire de la part de plusieurs gouvernements depuis 1945 (cela reflétant, hélas, l'opinion d'une partie de la population) qui a blessé l'institution.

Aujourd'hui, il faut se demander ceci: compte tenu de la taille modeste de l'économie canadienne et des tâches réelles qui se présenteront à l'avenir, dans quel champ d'expertise militaire convient-il d'investir aujourd'hui?

Acheter 65 chasseurs haut de gamme est une option. Mais il y en a certainement d'autres qui valent d'être examinées.