Personne ne sera surpris qu'il faille aborder la nouvelle année en se préoccupant d'un dangereux cocktail de religion, de haine et de mort. Car c'est sur ce mode que le Nouvel An s'est amené en Égypte lorsque, au sortir de la messe de minuit, 21 personnes ont été tuées et plusieurs dizaines blessées dans un attentat visant une église copte d'Alexandrie.

Personne ne sera surpris qu'il faille aborder la nouvelle année en se préoccupant d'un dangereux cocktail de religion, de haine et de mort. Car c'est sur ce mode que le Nouvel An s'est amené en Égypte lorsque, au sortir de la messe de minuit, 21 personnes ont été tuées et plusieurs dizaines blessées dans un attentat visant une église copte d'Alexandrie.

Depuis deux jours, l'Égypte vit donc sur un baril de poudre. Samedi et dimanche, des manifestations violentes ont eu lieu à Alexandrie puis au Caire. Hier, les autorités ont resserré la surveillance autour des églises. Pendant ce temps, des communiqués d'Al-Qaïda, à qui est attribué l'attentat-suicide, menacent aussi des églises coptes de France, d'Allemagne et du Royaume-Uni; même les Coptes du Canada, au nombre de 255 000, comptent prendre des mesures particulières de sécurité, ce qu'ils n'avaient jamais fait auparavant.

Pour revenir à eux, les Coptes comptent pour près de 10% des 80 millions d'Égyptiens et subissent depuis longtemps une escalade de la violence dirigée contre eux: par exemple, il y a exactement un an, un autre attentat dans une église avait fait six morts.

Jeudi et vendredi, ils fêteront donc la Noël orthodoxe dans l'esprit que l'on devine...

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Il existe des termes précis et d'usage courant pour désigner l'intolérance pratiquée à l'endroit des juifs ou des musulmans: l'antisémitisme et l'islamophobie. Étrangement, le terme de christianophobie, lui, ne jouit que d'une existence presque clandestine et n'est jamais utilisé. Pourtant, selon le Vatican, 75% des croyants persécutés dans le monde en raison de leur foi sont des chrétiens. Et, au Proche et au Moyen-Orient en particulier, où vivent 20 millions de chrétiens, leurs communautés, trop souvent soumises à la menace et à la violence, vivent un exode continu depuis des décennies.

Cas d'espèce: l'Irak. Le pays a déjà compté 1,5 million de chrétiens, mais ils ne sont plus aujourd'hui que 850 000. Et il y a fort à parier que ce nombre diminuera encore abruptement: en octobre, on le sait, un attentat a fait 68 morts dans une église catholique de Bagdad, semant la terreur.

Bref, un influent quotidien libanais voit dans cette escalade simultanée dans de nombreux pays de la région «un 11 septembre arabe permanent qui se déplace à travers des régimes agonisants»...

Certes, on peut rêver du jour où la religion n'alimentera plus la haine meurtrière, mais cela ne se produira pas dans un avenir prévisible. Aussi, est-il de la responsabilité des États d'assurer la sécurité des citoyens, peu importe leur foi - ou l'absence d'icelle. Mais encore là, il faut faire la part du rêve. Dans les pays où la religion est intimement liée à la politique et/ou à l'identité, la passion devient vite beaucoup plus puissante que n'importe quel gouvernement.

C'est ce que l'Égypte, en outre affligée d'un pouvoir autoritaire, mais vieillissant, se prépare peut-être à démontrer dans la douleur.