Peut-on classer «culturellement» une ville et ses citoyens? De prime abord, la notion même de culture semble s'opposer à une telle entreprise statistique. Mais on s'y livre tout de même, quitte à se désoler du résultat. Ainsi, Montréal serait l'avant-dernière ville au pays (17e sur 18) en termes de consommation de la culture... après toutes ces capitales de l'art dont le nom vient instantanément à l'esprit: Regina et Moncton, Winnipeg et Saskatoon!

Peut-on classer «culturellement» une ville et ses citoyens? De prime abord, la notion même de culture semble s'opposer à une telle entreprise statistique. Mais on s'y livre tout de même, quitte à se désoler du résultat. Ainsi, Montréal serait l'avant-dernière ville au pays (17e sur 18) en termes de consommation de la culture... après toutes ces capitales de l'art dont le nom vient instantanément à l'esprit: Regina et Moncton, Winnipeg et Saskatoon!

C'est le Conseil canadien sur l'apprentissage (relayé par le Maclean's) qui a octroyé cette note après avoir mesuré, ville par ville, la fréquentation des livres, des arts de la scène et des musées.

Or, cela seul suffirait à semer le doute sur le caractère mesurable de la culture, à moins de la réduire à sa composante académique la plus stricte.

La culture n'est pas, en effet, un produit que l'on peut estimer posséder après un certain nombre de livres lus, de pièces vues, de concerts entendus et de musées fréquentés. Bien qu'il s'agisse là de supports culturels éprouvés, il y a mille autres façons de fréquenter l'art, la pensée, le legs des civilisations.

Et la culture n'est pas non plus un produit de facture unique (One size fits all, comme on disait dans la Grèce antique...) qui, versé dans l'aqueduc d'une ville en même temps que le chlore, la transforme en cité de la culture. Chaque ville est «culturelle» (ou ne l'est pas) à sa façon, différente de toutes les autres.

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Cela dit, il serait présomptueux de prétendre que Montréal est au mieux de sa forme culturelle.

La métropole n'est pas assez riche: c'est peut-être désolant, mais le niveau d'aisance d'une société influe bel et bien sur la richesse de sa culture. Elle n'est pas assez éduquée: avouons collectivement que ce n'est pas notre premier souci, alors que l'école est le premier déterminant de l'attitude que chacun aura face à la culture. Enfin, Montréal n'est pas assez belle, et il ne s'agit pas d'un attribut frivole : à chaque seconde, une ville nous enveloppe de grisaille ou de beauté... et l'une est à l'évidence plus inspirante que l'autre.

On notera que les ratés de l'éducation, de l'urbanisme et de l'esthétique urbaine ont aussi à voir avec la relative modestie de notre économie. Et que cette même rareté des moyens, combinée à un éveil scolaire à la culture qui n'est pas ce qu'il devrait être, ont à son tour des conséquences sur la fréquentation de la culture telle que mesurée par le CCA...

Voyant cela, ne pourrait-on pas considérer que le geste le plus efficace pour stimuler la culture serait de travailler à l'enrichissement collectif? C'est probablement vrai. Mais c'est le genre de considération qui, dans le monde de la culture, n'a pas cours.