L'Afghanistan est devenu une épine au pied: certains ne prévoient-ils pas que ce sera le «Vietnam» de Barack Obama?

Le scepticisme, sinon la franche hostilité, est le sentiment qui domine dans l'opinion publique des nations qui y combattent, y compris chez les Américains. Le Congrès et même la haute gomme de l'appareil militaire des États-Unis, civile et en uniforme, sont divisés sur ce qu'il convient de faire. Au Canada, le cinquième «rapport d'étape», déposé mardi, est plus que circonspect quant aux progrès accomplis. Et, comme on le sait, nous cesserons de combattre en Afghanistan en 2011, mais pour faire quoi et dans quel cadre? Cela reste à déterminer.

Hier, Stephen Harper s'est entretenu avec Barack Obama à la Maison-Blanche.

Les deux hommes ont parlé de l'Afghanistan, bien sûr. Mais de façon visiblement moins pressante que des échanges transfrontaliers ou des... avions nolisés de la Ligue nationale de hockey! Ni le président ni le premier ministre n'ont évoqué de demandes ou d'intentions nouvelles quant à l'avenir des Forces armées canadiennes en Afghanistan.

 

Sur un plan plus global, Barack Obama a avoué que la stratégie occidentale dans ce pays n'a pas toujours été «aussi claire qu'elle aurait pu l'être». Et que toute décision - sur l'augmentation des effectifs, par exemple - ne pourra être prise qu'en fonction d'une nouvelle stratégie que l'on attend toujours.

Or, cette stratégie devra être, non seulement nouvelle, mais surtout réaliste et modeste.

Réaliste?

Cela consiste à se rendre compte que «construire une nation» (nation building) en Afghanistan est, quels que soient les moyens déployés, hors de portée. «Dans quelques années, l'Afghanistan sera toujours pauvre, corrompu et dysfonctionnel», prévient (dans Newsweek) Fareed Zakaria, l'un des commentateurs les plus respectés aux États-Unis.

Tout près de 1400 soldats occidentaux, dont 130 Canadiens, sont morts en Afghanistan et 108 000 s'y trouvent toujours... en dépit de quoi les talibans gagnent du terrain. La corruption et l'économie fondée sur le pavot se portent mieux que jamais. Le milliard de dollars investi par le Canada dans la reconstruction est évanescent (par exemple, on a construit cinq écoles sur les 50 prévues). Enfin, l'élection présidentielle du 20 août a été, disons-le, un échec: 33% des bulletins pourraient être des produits de la fraude; un second tour n'est toujours pas écarté; le pays est entretemps sans gouvernement fonctionnel.

Modeste?

Cela consiste largement à revenir à l'objectif d'origine: s'assurer que l'Afghanistan ne sera plus un sanctuaire pour le terrorisme islamiste. Pour cela, ce qu'on pourrait appeler la «diplomatie de terrain» sera la meilleure arme, au service d'une stratégie de compromis nationaux et de négociations locales entre ceux, et avec ceux, qui détiennent de facto le pouvoir.

Que ça plaise ou non, ce sera ultimement le seul moyen d'abaisser le niveau de violence. Et de permettre à l'aide économique ou humanitaire, dont celle du Canada, de vraiment se déployer.