En moins de 72 heures, les troupes d'Adolf Hitler ont envahi la Pologne; la Grande-Bretagne et la France ont déclaré la guerre à l'Allemagne. C'est de cette façon qu'a débuté, il y a 70 ans, la Seconde Guerre mondiale. Quelques jours plus tard, le 9 septembre 1939, The Economist opinait: «Il est difficile de voir comment un historien du futur pourrait douter que c'est Hitler qui, délibérément et sans raison, a déclenché ce conflit».

Pourtant, l'histoire de ces six ans d'enfer ne cesse d'être réécrite sur un mode qui, parfois, frôle le révisionnisme.

 

Hier, à Gdansk, les leaders d'une vingtaine de nations ont commémoré l'événement dans une ambiance fort peu sereine. On a assisté, en effet, à un chassé-croisé d'accusations ayant pour objectif de rejeter sur autrui la part maximale de blâme. À telle enseigne que le premier ministre polonais, Donald Tusk, a dû rappeler que, «sans mémoire honnête, ni l'Europe, ni la Pologne, ni le monde ne vivront jamais en sécurité».

On connaissait déjà les négationnistes de l'Holocauste et les conspirationnistes de Pearl Harbor (les Américains auraient provoqué ou laissé porter l'attaque japonaise). Dorénavant, il faut compter aussi avec les thèses russes dont certaines ont été endossées, encore hier, par le premier ministre Poutine. Un: par son rapprochement de 1934 avec les nazis, la Pologne creusa sa propre tombe. Deux: les accords de Munich (1938) donnèrent à la France et à la Grande-Bretagne une large responsabilité dans le déclenchement du conflit. Trois: le pacte germano-soviétique du 23 août 1939 ne compta que fort peu dans la décision d'Hitler de lâcher ses troupes huit jours plus tard.

Pour faire bonne mesure, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a qualifié de «comble du révisionnisme historique» le fait de comparer les politiques de Staline et d'Hitler...

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Or, de façon sûre, l'Histoire enseigne ceci.

À beaucoup d'égards, les deux potentats sont bel et bien comparables. Le pacte Ribbentrop-Molotov libéra Hitler de tout souci à l'Est, lui pavant la voie vers le reste de l'Europe. Munich fut un aveu de faiblesse de Londres et de Paris, mais pas un pacte avec le diable. Il est extraordinairement indélicat de jeter le blâme sur la Pologne, tour à tour malmenée par les deux tyrans avant de se retrouver cadenassée par Moscou.

Certes, Poutine et son entourage ont des raisons de réécrire l'Histoire à leur convenance - politique intérieure et orgueil national, bien entendu. Cependant, contrairement à ce qui est le cas pour d'autres événements historiques, les tenants et aboutissants de la Seconde Guerre mondiale sont connus, avérés, irréfutables (à lire: le blogue de l'édito sur Cyberpresse).

Aussi, voir la vérité historique triturée de cette façon aux plus hauts niveaux constitue une leçon de malhonnêteté et de cynisme dont le commun des mortels pourrait bien se passer.