Un chef d'une Première Nation qui compte 80 personnes payé près de 1 million en 2013.

Adoptée dans la controverse, la Loi sur la transparence financière des Premières Nations n'était en vigueur que depuis quelques heures quand des journalistes ont mis la main sur le salaire exorbitant du chef Ron Giesbrecht, de la nation Kwikwetlem, en Colombie-Britannique. Samedi, des membres de sa communauté, dont des élus, ont demandé sa démission.

Il serait facile pour le gouvernement conservateur de crier victoire. C'est pour démasquer ce genre de mauvaise gestion et permettre aux membres des Premières Nations de demander des comptes à leurs élus qu'Ottawa dit avoir mis en place cette mesure.

Selon les dispositions de la loi, près de 600 conseils de bande de Premières Nations doivent rendre publics leurs états financiers ainsi que la rémunération des chefs et des conseillers élus. L'information, d'abord destinée aux autochtones eux-mêmes, doit être publiée 120 jours après la fin de l'exercice financier et doit apparaître sur le site du ministère fédéral des Affaires autochtones.

Pour le moment, les Premières Nations ne se bousculent pas pour étaler leurs affaires. Seulement 10 % d'entre elles se sont conformées à cette nouvelle exigence avant la date limite. Au Québec, elles ont été un peu plus nombreuses. En tout, 27 % des 30 Premières Nations touchées par la loi se sont exécutées. On apprend dans les documents que les chefs reçoivent des salaires qui vont de 28 600 $ chez les Micmacs de Gespeg à 101 011 $ chez les Mohawks de Kahnawake - un écart important, mais difficile à juger à première vue tant les responsabilités des chefs varient d'une nation à une autre.

Bon objectif, mauvais moyen

Est-ce nécessairement parce qu'ils ont quelque chose à cacher que les autres conseils de bande retiennent l'information ? Il serait dangereux d'en présumer autant.

Plusieurs chefs autochtones se disent en faveur d'une plus grande transparence, mais ils n'ont pas aimé se faire tordre le bras par les conservateurs de Stephen Harper, qui ont imposé leur loi, en mettant aux ordures un processus de consultation entamé par leurs prédécesseurs.

Même si les objectifs sont louables et l'information nécessaire, le paternalisme d'Ottawa irrite et crée une levée de boucliers au sein de communautés déjà méfiantes. En mettant les Premières Nations sur la défensive, le processus devient contreproductif.

Que se passera-t-il pour ceux qui ne publieront pas leurs résultats ? La loi prévoit que des membres de leur nation pourront saisir les tribunaux. Si les élus refusent alors d'obtempérer, le gouvernement fédéral pourra retenir les sommes à verser. En ce moment, cependant, un membre d'une Première Nation qui accepterait de jouer le jeu d'Ottawa se mettrait toute sa communauté à dos. On revient à la case départ.

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