Il ne faut pas se fier aux apparences. Les données sur le chômage publiées aux États-Unis vendredi accréditent la justesse du dicton. À première vue, les nouvelles semblaient excellentes. Création de 431 000 emplois en mai. La meilleure performance mensuelle depuis 10 ans. Le cinquième mois consécutif de remontée. Et un taux de chômage en régression à 9,7%, une chute de deux points de pourcentage, plus substantielle que les prévisions.

Il ne faut pas se fier aux apparences. Les données sur le chômage publiées aux États-Unis vendredi accréditent la justesse du dicton. À première vue, les nouvelles semblaient excellentes. Création de 431 000 emplois en mai. La meilleure performance mensuelle depuis 10 ans. Le cinquième mois consécutif de remontée. Et un taux de chômage en régression à 9,7%, une chute de deux points de pourcentage, plus substantielle que les prévisions.

Hélas, ce n'était qu'un écran de fumée. Derrière, la réalité est plus dramatique. Presque tous les nouveaux emplois sont temporaires et proviennent du secteur public: il s'agit essentiellement des 411 000 travailleurs embauchés pour le recensement américain.

Le secteur privé, dont on attendait une contribution de 100 000 emplois, n'a livré que des brindilles. Or, ce sont précisément 100 000 emplois qui sont nécessaires chaque mois pour seulement absorber la main-d'oeuvre qui envahit le marché du travail. Ce n'est pas demain la veille que l'Oncle Sam récupérera les 8 millions d'emplois perdus depuis le début de la récession en 2008.

La baisse du taux de chômage est aussi trompeuse: non, elle n'est pas attribuable à une flopée d'embauches, mais plutôt aux trop nombreux chercheurs d'emploi qui ont abandonné la partie. Fausse joie!

Les marchés boursiers n'ont pas été dupes à New York. En fait, les investisseurs ont reçu une douche froide. Les indices ont dégringolé de 3% vendredi.

Ces dernières semaines, toute l'attention du secteur économique a été concentrée vers l'Europe, dont l'économie vacille depuis l'explosion de la crise financière en Grèce. Mais il ne faudrait quand même pas perdre de vue les États-Unis. La reprise y est fragile. La vive relance que le Canada connaît nous donne l'impression que les Américains sont sortis du bois, puisque nos économies sont inextricablement liées. Or, ce n'est pas le cas.

Sous la braise du V de la reprise, couve le redouté W qui menace d'enterrer sa moitié. Pessimisme débridé? Peut-être pas. Le programme de relance de l'administration Obama tire à sa fin. Ne comptons pas trop sur le Congrès pour une injection supplémentaire, à l'approche des élections de mi-mandat. Le secteur privé est frileux de prendre la relève, car les ventes au détail vivotent. Les consommateurs américains, qui font rouler 70% de l'économie, ne peuvent plus puiser dans leur actif immobilier, qui a fondu durant la récession, pour dépenser davantage. Déjà au plancher depuis deux ans, les taux d'intérêt ne sont plus d'aucun secours pour revigorer l'économie. Le temps moyen passé en chômage atteint des records. Pour compléter ce portrait déprimant, le salaire médian diminue.

Pendant ce temps, chez nous, l'emploi est au beau fixe. Le taux de chômage est demeuré stable à 8,1% au Canada, le Québec suit la parade à 8%. Les 67 000 emplois à temps plein qui ont vu le jour, dont les deux tiers proviennent du privé, ont largement compensé la diminution de 43 500 jobs à temps partiel. L'économie roule à plein régime, le mot «expansion» commence même à se faire entendre. Soyons prudents. Une rechute chez nos voisins du Sud pourrait casser le party en entravant notre bel élan.