Quand, au juste, la parole de Lino Zambito est-elle devenue aussi crédible que celle du commissaire de l'UPAC ? Quand est-ce que la pertinence des propos de Luigi Coretti et de Ken Pereira a-t-elle rattrapé celle des patrons de la SQ et du DPCP ?

À croire les commentateurs et les membres de l'opposition, tout cela aurait la même valeur, avec une prime, même, à ceux qui ont le « courage » de contredire les institutions.

On n'est plus dans la méfiance, on est dans la défiance, généralisée : tous pourris !

Et si on n'a pas de preuve pour l'affirmer, eh bien, suffit de trouver quelqu'un quelque part qui le dit.

Or le témoignage percutant qu'a livré jeudi le commissaire de l'Unité permanente anticorruption nous a rappelé l'importance de la prudence, une vertu qui semble avoir disparu en même temps que la patience.

En quelques heures, Robert Lafrenière a retourné comme des crêpes chacune des allégations sans preuve qui ont été faites ces derniers jours.

Solide, sans détour ni langue de bois, M. Lafrenière a affirmé 1) qu'il n'y avait pas d'ingérence politique dans les enquêtes en cours, 2) qu'il n'avait pas de contacts avec le bureau du premier ministre, 3) que l'enquête Mâchurer, qui ciblerait entre autres Marc Bibeau et Jean Charest, aura bel et bien « une conclusion ».

« Soyez certains, a-t-il ajouté, que je vais me rendre au bout de cette enquête-là, je vais me rendre aux conclusions, à la terminaison, et on va déposer au DPCP, j'en suis convaincu. »

Les contempteurs ne se sont évidemment pas excusés. Ils ont simplement ajusté leur discours : ils ne demandent plus qu'on pende haut et court les principaux concernés, ils exigent maintenant qu'on fasse vite... pour pouvoir enfin les pendre haut et court.

La CAQ s'est ainsi ridiculisée (encore une fois) en faisant une règle de trois pour prouver que le budget de l'UPAC était élevé quand on le comparait au nombre d'accusés des 11 derniers mois ! Faudrait-il des « quotas d'accusés » comme il y a des « quotas de tickets » ?

Et des commentateurs ont emboîté le pas en déclarant que la patience du peuple « a ses limites », en exigeant une « accélération » des enquêtes, et même en évoquant « une obligation de résultat ». Comme si le système judiciaire devait répondre aux humeurs des citoyens, comme s'il servait non pas à sanctionner les contrevenants à la loi, mais à répondre à la vindicte populaire.

Le peuple exige un sacrifice sur l'autel politique. Il faut donc offrir un sacrifice sur l'autel politique. Et le plus rapidement possible, svp, car le peuple est tanné d'attendre !

Eh oui, c'est dur de reconnaître une telle chose en 2017, mais parfois, les politiciens disent vrai.

Philippe Couillard, jusqu'à preuve du contraire, disait vrai quand il affirmait qu'il n'était pas informé des enquêtes en cours et qu'il n'intervenait pas.

Eh oui, l'enquête Mâchurer est longue, nécessite sa dose de patience, sans que cela prouve l'existence d'un grand complot ou d'un manque d'intégrité de l'UPAC.

Le meilleur rempart contre la corruption, ce ne sont pas les accusations lancées à tout vent, c'est un système policier et judiciaire qui a les coudées franches pour mener ses dossiers de l'enquête jusqu'à la cour. À son rythme, sans intervention politique ni populaire.

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