Alors qu'on s'apprête à célébrer le 50e anniversaire d'Expo 67, les préparatifs vont bon train en vue de l'ouverture de la prochaine Exposition dans quelques semaines.

Question quiz : pouvez-vous nommer la ville où se tiendra l'événement ?

Le nom du pays hôte, à la limite ?

Sa zone géographique ?

Avouez, vous ne savez pas. Car bien peu de gens ont entendu parler d'Expo 2017, qui doit être inaugurée début juin à Astana, la capitale du Kazakhstan.

Cela prouve deux choses. D'abord que les grandes expositions (universelles ou spécialisées) ne sont plus ce qu'elles étaient lorsque Montréal accueillait le monde au milieu du fleuve. Ensuite que Montréal aurait intérêt à remiser l'Expo dans la boîte à souvenirs... pour de bon.

C'est devenu une curieuse tradition depuis quelques années : quelqu'un quelque part propose que la métropole dépose à nouveau sa candidature pour accueillir cette gigantesque foire.

En janvier dernier, c'était les conseillers municipaux Marvin Rotrand et Justine McIntyre qui déposaient une motion en vue d'Expo 2025 (retirée par la suite). Il y a 10 ans, c'était le chef de l'opposition Benoit Labonté qui souhaitait mettre le cap sur 2020. Et juste avant, c'était un groupe de citoyens volontaires qui convoitait... l'Expo 2017.

On comprend la nostalgie, la volonté de reproduire un événement grandiose, le désir d'attirer à nouveau des millions de personnes.

Après tout, l'Expo a été un moment fondateur du Montréal moderne, un événement qui a métamorphosé la métropole en plus de la placer « sur la map ». Mais c'est justement parce que l'événement a une telle portée, un tel impact sur la ville et l'imaginaire collectif, qu'une redite ne peut qu'être décevante. Comme la suite d'un chef-d'oeuvre.

Ironiquement, penser à l'Expo 2020 ou 2025 montre notre incapacité à nous projeter dans l'avenir. Une sorte de fuite en avant qui tend vers l'immobilisme.

L'exposition universelle est « un projet du XIXe siècle », pour reprendre les mots de Phyllis Lambert. C'est une foire qui était pertinente à l'époque où l'on découvrait des cultures en visitant leur pavillon. C'est un événement qui a peut-être encore sa raison d'être, mais pour une poignée de villes seulement. Les villes qui ont besoin de se faire connaître ou de gagner en prestige (Astana, Dubaï), par exemple. Les grandes métropoles qui multiplient les événements d'envergure (Paris, Shanghai).

Mais Montréal ? Les conditions objectives qui justifiaient la tenue de l'Expo en 67 n'existent tout simplement plus.

La métropole, à l'époque, avait besoin de se faire connaître. Elle avait besoin d'infrastructures, d'équipements lourds, d'investissements publics. Elle avait besoin d'attirer les regards et l'attention, de rattraper son retard, de sortir de la Grande Noirceur.

Les temps ont changé, Montréal aussi. Aujourd'hui, la métropole a besoin de faire le ménage avant d'accueillir à nouveau la visite.

Elle a besoin de retaper ses infrastructures, de moderniser celles dont elle a hérité il y a 50 ans, d'ajouter des équipements qui servent au quotidien.

Les résultats du sondage CROP publiés vendredi dernier dans La Presse+ montrent d'ailleurs que les contribuables demandent des infrastructures utiles (système léger sur rail, mobilité électrique, transports en commun) plus que de grands projets ludiques (Formule 1, stade, équipe de baseball).

Il est donc trop tôt pour espérer refaire le coup de l'Expo. Trop tôt, en 2025 ou même 2030, pour rêver à un événement dont les risques financiers, convenons-en, dépassent les gains potentiels.

Il ne faut jamais dire jamais. Peut-être qu'il sera indiqué de concourir pour... l'Expo 2067. Mais pour l'heure, on est mieux de chérir nos souvenirs que d'entretenir le désir d'en créer de nouveaux.

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