Je quitte la chronique pour l'éditorial, mais je n'aurai pas à déplacer mes boîtes très loin, car entre la salle de rédaction et les bureaux de l'édito, il y a à peine trois étages. Et entre la fonction de chroniqueur et celle d'éditorialiste, la distance est moins grande encore.

Les deux postes, après tout, sont occupés par des journalistes qui signent leur commentaire. Ils servent tous deux à se poser, à prendre du recul, à élargir le regard. Ils permettent de prendre position, de confronter les idées reçues, de critiquer, saluer, proposer.

L'un et l'autre, en somme, ont pour but d'aider les lecteurs à se faire leur propre opinion sur l'actualité.

L'éditorial a ses spécificités, cela dit. Il se pratique dans son propre écosystème qu'est la section Débats. Il doit tenir compte des prises de position passées du journal. Et il a la particularité de se faire en équipe.

Je n'écrirai donc plus au « je », mais au « nous », comme les autres membres de l'édito. Nous, l'équipe éditoriale, mais aussi nous, La Presse, son éditeur, son propriétaire. Car à la différence des chroniqueurs, l'éditorialiste fait connaître publiquement l'orientation idéologique du journal.

Il s'agit là non pas d'un chemin étroit à respecter, mais d'un large corridor qui permet d'emprunter le tracé dessiné par les positions personnelles des éditorialistes et des débats qui en découlent.

Une philosophie générale existe pour certaines grandes orientations, mais elle est façonnée par les esprits libres qui forment l'équipe éditoriale, elle se précise au gré des réflexions de ses membres, des débats vigoureux menés à l'interne et des développements quotidiens de l'actualité.

Elle s'enrichit également des textes aux opinions diverses publiés dans la section Débats, signés chaque jour par les décideurs, chroniqueurs, collaborateurs, acteurs... et principalement par vous, les lecteurs.

Je ne ménagerai d'ailleurs pas d'efforts, à titre de directeur de la section, pour qu'elle continue d'être ce qu'elle est au quotidien : un vaste carrefour d'idées à l'image des courants de pensée qui traversent la société.

Quand on sait qu'en 15 ans, le nombre de lettres envoyées annuellement à La Presse a fait un bond spectaculaire de 7000 à 65 000, on comprend à quel point la section Débats est au coeur des habitudes des Québécois et doit ainsi en être le fidèle reflet.

Dans une ère « post-factuelle », dans un univers numérique qui nous conforte dans nos préjugés, dans un monde où la méfiance est devenue réflexe, le débat basé sur les faits et données est essentiel. Et la section Débats de La Presse veut en être le forum privilégié.

Pourquoi donc déménager mes boîtes à l'éditorial ? Pour participer pleinement, à ma façon, à ce nécessaire choc des idées.

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