Et si les maires gouvernaient le monde?

La question que pose le politologue américain Benjamin Barber dans son livre If Mayors Ruled the World, publié cette semaine, est volontairement provocatrice. Mais elle n'en est pas moins pertinente dans la foulée du rapport du GIEC, qui montre la nécessité d'une lutte contre les changements climatiques au niveau international, et aussi local.

Les grandes villes ne sont plus de simples dispensatrices de services de proximité. Elles doivent toujours ramasser les ordures, mais elles doivent aussi, aujourd'hui, innover, attirer les entreprises, courtiser les étudiants étrangers, s'occuper d'immigration et... lutter contre le réchauffement climatique.

C'est vrai en Europe, où bien des pays jadis volontaires ont relégué aux villes le soin de s'y attaquer. C'est vrai aux États-Unis, où le blocage des républicains oblige les centres urbains à prendre le relais de la Maison-Blanche. Et c'est vrai au Canada, où le combat est mené non plus au niveau national, mais bien provincial et municipal.

Voilà un exemple concret en appui à la conclusion de M. Barber: les gouvernements nationaux ont échoué dans bien des domaines où leur taille et leurs déchirements idéologiques les empêchent de jouer un rôle proactif.

Il faut donc, dans bien des domaines, réapprendre à raisonner à l'échelle des cités, non plus des États-nations, incapables de collaborer en dehors de leurs frontières, comme le montrent les négociations entourant le protocole de Kyoto, au point mort depuis des années. Un prétexte dont se servent bien des pays, comme le Canada, pour reporter indéfiniment plans et actions.

Cela ne pose pas problème dans un parlement, loin des impacts concrets d'un climat changeant. Mais il en va tout autrement dans les villes, obligées de répondre à une crise qu'elles vivent en première ligne (70 % des GES de la planète). Les maires doivent ainsi réagir aux épisodes de smog, penser à des solutions pour réduire les îlots de chaleur, limiter le recours à l'auto solo grâce au transport collectif, réduire les émissions liées au traitement des ordures, etc.

Bref, ils doivent répondre de manière locale à un problème global. Un phénomène (appelé "glocalisme") qui incite Barber à encourager les villes à miser sur le partenariat, sur les réseaux, sur les rencontres internationales, comme ce Sommet Ecocity qui a réuni des centaines de villes cette fin de semaine à Nantes.

La Ville de Montréal aurait intérêt à suivre les conseils du professeur Barber. D'abord parce qu'elle pourrait agir avec plus de conviction (son premier plan de réduction d'émissions a été adopté... la semaine dernière!), ensuite parce qu'elle se tient à distance des réseaux de collaboration internationaux (que ce soit le C40, le Global Mayors' Forum ou le Pacte de Mexico).

Il faut évidemment que les pays tracent la voie d'une action globale à grande échelle, mais ce sont les solutions locales à plus petite échelle qui la rendront possible.

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