Afin de convaincre le président Obama de donner le feu vert au projet d'oléoduc Keystone XL, le premier ministre Stephen Harper s'est engagé à réduire l'impact environnemental des sables bitumineux.

Encore une fois.

On ne compte même plus les promesses du gouvernement Harper à cet effet depuis sa prise de pouvoir il y a sept ans. Non seulement n'ont-elles pas été tenues, mais elles sont si nombreuses qu'elles se contredisent au fil des ans!

Après avoir gagné les élections de 2006, en effet, les conservateurs ont détruit les plans et programmes des libéraux, promettant de «nettoyer l'atmosphère» de manière beaucoup plus efficace à l'aide d'un nouveau plan «Made in Canada».

Ce plan, on ne l'a jamais vu. Pas plus que tous ceux qui ont été promis depuis, notamment en 2012 et en mars 2013. Et voilà qu'aujourd'hui, la CBC nous apprend que le premier ministre est prêt à adopter les cibles que lui proposeront les États-Unis, une stratégie «Made in USA», autrement dit, en échange d'une bénédiction américaine pour Keystone...

Le geste est très habile, mais tardif et insuffisant. Au moment où le président en a plein les bras avec la Syrie, le premier ministre lui propose de joindre leurs forces pour s'attaquer aux changements climatiques, une promesse peu engageante qui donne l'impression d'un certain volontarisme, d'une main tendue, voire d'un virage politique sincère.

Or, à cette étape-ci des pourparlers, comment ne pas voir dans cet appel à l'effort conjoint une énième fuite en avant? Keystone a besoin d'une approbation imminente, selon Ottawa, alors qu'une stratégie canado-américaine nécessiterait des années de discussion.

On le voit avec le «Dialogue sur l'énergie propre», une initiative de MM. Harper et Obama qui, depuis son lancement en 2009, n'a rien donné de bien significatif. Si, en quatre ans, on n'a pu faire mieux qu'une «déclaration d'intention» sur une hypothétique captation de carbone et quelques recherches sur les biocarburants algueux, imaginez le temps qu'il faudrait pour s'entendre sur des cibles communes de réduction des émissions, dresser une liste des actions nécessaires et faire approuver le tout par les instances des deux pays.

Or le fardeau de la preuve incombe au Canada, dans ce dossier. C'est à lui de démontrer qu'il a compris le message envoyé maintes fois dans le passé par l'administration américaine. À lui de laisser tomber les fausses promesses au profit d'une stratégie conforme à l'engagement pris par le Canada à Copenhague, soit de limiter le réchauffement climatique à 2°C.

Cela nécessiterait non pas l'ouverture d'un autre sempiternel «dialogue» avec les États-Unis, qui risquerait de s'empêtrer au Congrès ou dans les officines conservatrices, mais bien des cibles établies scientifiquement ainsi qu'un plan clair pour les atteindre.

Si Ottawa tient autant au projet Keystone, il doit cesser de repousser l'inévitable et déposer la réglementation qu'il promet depuis sept ans. Une réglementation faite par et pour le Canada.

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