Les arrestations à Laval et les défections qui ont eu lieu à Montréal, hier, marquent la fin d'une époque dans le Grand-Montréal, une époque marquée par une grave dérive éthique et morale à laquelle on tente aujourd'hui de mettre fin.

D'un côté de la rivière des Prairies, on s'attaque à l'origine du problème avec l'arrestation de l'ancien maire Vaillancourt et d'une trentaine d'autres personnes liées au «système Laval». De l'autre, on efface les traces du passé en sabordant le parti Union Montréal, soupçonné de financement occulte.

On tente ainsi d'arracher les racines d'un mal qui semble généralisé. Mais il faudra plus que des gestes d'éclat pour que s'ouvre une nouvelle ère éthique.

Au-delà des individus et des formations, c'est une véritable culture que révèlent jour après jour les travaux de la Commission Charbonneau. Une culture qui dépasse les frontières d'une ville, d'un conseil, d'un parti...

On le voit dans les accusations portées hier à Laval, tant par le nombre de personnes accusées, que par l'hétérogénéité du groupe. On le voit dans les témoignages à la Commission, qui montrent qu'ils étaient nombreux, élus et fonctionnaires, à savoir et à se taire. On le voit dans le nombre de municipalités touchées par les élections «clés en main» et dans la notoriété d'un homme comme Gilles Cloutier.

L'ancien ministre Jacques Léonard évoque pudiquement l'«absence d'une culture éthique solidement ancrée chez certains élus et employés» dans son rapport sur l'octroi des contrats à Montréal, déposé mercredi. C'est un euphémisme. On semble plutôt être en présence d'une culture amorale bien implantée, qui finit par contaminer certains élus et employés.

Il ne suffit donc pas d'arrêter quelques bandits présumés ou de saborder un parti politique, pas plus qu'il ne suffit d'insuffler un peu d'éthique là où il en manque. Il faut plutôt remplacer une culture de l'intérêt individuel par une culture de l'intérêt général, ce qui est autrement plus complexe...

Cela passe par la formation et l'élaboration de codes d'éthique (en 2009, à peine 10% des municipalités en avaient un). Par une révision du financement électoral et des mécanismes de contrôle interne. Par le renforcement de l'expertise interne, de la surveillance, de l'imputabilité et de la transparence des travaux à l'hôtel de ville.

Et cela passe, surtout, par un «leadership éthique», pour reprendre l'expression de l'éthicien Michel Dion, de l'Université de Sherbrooke. Cela signifie une exemplarité des personnes en position d'autorité, qui manifestent au quotidien les valeurs de la municipalité qu'ils représentent. Et qui sanctionnent sévèrement ceux qui en dérogent...

Sans cela, sans l'implantation d'une culture de l'éthique au sommet des municipalités, les règles, vérifications et mesures de contrôle risquent d'être rapidement contournées, comme elles l'ont été ces dernières années.

Il faut certes arracher les racines du problème, mais il faut surtout s'assurer qu'elles ne repoussent pas.

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