Nous publions aujourd'hui le dernier de deux éditoriaux sur l'exode des familles montréalaises.

Montréal doit-elle s'avouer vaincue? Après dix ans d'initiatives qui n'ont pas infléchi l'exode des jeunes familles, doit-elle se résigner à perdre les ménages dès que bébé se pointe le nez?

Certains répondent oui, estimant que la Ville perd son temps en essayant d'éviter l'inévitable. Or les quelques succès à l'étranger montrent qu'il est possible de retenir en ville plus de ménages avec enfants... à condition de manier à la fois la carotte et le bâton.

Au cours de la dernière décennie, Montréal a privilégié les incitatifs: programmes d'aide financière, mesures d'apaisement de la circulation, verdissement de ruelles, prolongement du réseau cyclable, etc.

Autant d'initiatives qui améliorent la qualité de vie urbaine. Mais qui, en soi, ne suffisent pas à ralentir l'exode des familles vers la banlieue. Dans un contexte où le coût des propriétés sur l'île explose, les tarifs du transport collectif grimpent, les taxes et surtaxes se multiplient, on ne peut espérer retenir les parents avec quelques mesures vertes...

Pour avoir un effet plus important, Montréal doit se résoudre à ajouter le bâton à la carotte, main dans la main avec Québec.

La Ville n'a d'autre choix que d'orienter un marché qui n'en a que pour les jeunes professionnels sans enfants, d'abord en achetant et développant certains terrains, ensuite en encadrant davantage les promoteurs. C'est ce qu'ont fait les villes qui ont eu du succès. Oslo a obligé les promoteurs à inclure trois chambres dans la moitié des nouvelles maisons. Toronto exige que 10% des unités offrent trois chambres. Vancouver en demande deux, mais pour 25% des nouvelles constructions.

Certes, Montréal peut renforcer son programme d'accès à la propriété, mais cela n'aura que peu d'effet s'il n'y a rien sur le marché pour que les familles s'en prévalent...

Le gouvernement, pour sa part, doit permettre à la Ville d'imposer des exigences aux promoteurs, mais il doit surtout mettre fin à la concurrence déloyale que la banlieue livre à la métropole grâce à une fiscalité qui l'incite à développer toujours plus loin... avec l'aide des contribuables québécois qui payent les nouveaux équipements (autoroutes, écoles, hôpitaux, etc.).

Les maisons sont moins chères dans les couronnes en partie parce que les banlieusards ne payent qu'une infime partie de la facture engendrée par l'étalement. Si le gouvernement Marois compte retenir les familles sur l'île, il doit donc rendre les municipalités moins dépendantes des nouveaux lotissements, mais il doit aussi refiler le coût de l'étalement aux banlieues (redevances de développement, taxes scolaires spéciales, péréquation régional des revenus de constructions) et aux banlieusards (péage à la distance, surtaxe sur l'immatriculation, surtaxe foncière).

On s'entend, la ville ne peut pas retenir les familles qui choisissent les couronnes pour l'espace et la tranquillité. Mais elle peut certainement tenter de convaincre celles qui quittent l'île par dépit.

Veuillez cliquer sur ce lien pour lire le premier texte de la série, Le déclin tranquille

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