Plus les efforts environnementaux seront grands, plus le Canada et les États-Unis réussiront à réduire leurs gaz à effet de serre, «mieux nous nous porterons tous», a lancé l'ambassadeur américain au Canada, David Jacobson, il y a quelques jours.

Le message lancé au gouvernement Harper était limpide: aidez-nous à dire oui au projet Keystone XL, sinon...

Les propos de M. Jacobson, formulés à la suite d'un discours de l'Union portant en grande partie sur le climat, ont fait grand bruit à Ottawa, où l'on décortique chaque virgule, chaque propos, chaque intonation du président Obama depuis sa réélection.

On réagit ainsi au quart de tour, on tente de contrer le discours négatif, on essaye de prouver que le Canada a un bien meilleur bilan environnemental que ce qu'en disent les écologistes. Mais on s'en tient, encore et toujours, à quelques phrases creuses qui ne sont pas à la hauteur des nombreux avertissements formulés pas l'administration Obama depuis cinq ans...

Déjà, en 2008, un conseiller à l'énergie du candidat Obama avait souligné l'importance pour le Canada de réduire l'impact des sables bitumineux, sans quoi cette source pétrolière «ne cadrerait pas» avec les objectifs à long terme du futur président.

L'année suivante, au tour du secrétaire américain à l'Énergie, Steven Chu, d'affirmer que le pétrole albertain «mérite d'être exploité d'une façon plus soucieuse de l'environnement», précisant nourrir beaucoup d'espoir dans la technologie verte.

Puis en 2010, une cinquantaine de membres du Congrès s'opposaient à Keystone XL et des centaines de chefs d'entreprise demandaient à la Maison-Blanche de tourner le dos au pétrole canadien. Des critiques qui s'ajoutaient à la couverture défavorable du National Geographic et à la résolution des 1100 membres de la United States Conference of Mayors, qui souhaitaient réduire, voire interdire l'achat d'essence issue des gisements bitumineux.

Et comment ont réagi le gouvernement Harper et les pétrolières? En répétant avec arrogance que le pétrole bitumineux trouvera acheteur ailleurs, plutôt qu'en réduisant véritablement l'impact environnemental des sables bitumineux.

Or voilà manifestement à quoi l'ambassadeur américain faisait référence, la semaine dernière, lorsqu'il a pris l'initiative de communiquer avec les journalistes canadiens, ce qui conforte la thèse du service commandé depuis la Maison-Blanche: si Keystone n'a pas encore été approuvé, c'est en grande partie parce que le Canada n'a aucune mesure significative de réduction des gaz à effet de serre, aucune réglementation contraignante pour limiter l'impact des sables bitumineux, aucune volonté de se joindre à la lutte internationale contre les changements climatiques.

Les Américains non plus, il est vrai. Mais en promettant de faire du climat une «mission personnelle» de son second mandat, le président Obama entend clairement en faire plus. Et il aimerait que son bon ami Stephen Harper en fasse autant pour qu'il puisse enfin répondre favorablement au Canada, mais aussi aux États américains, aux syndicats, aux entreprises favorables à Keystone.

Si les grandes organisations écologistes américaines ont réussi à mobiliser une partie de l'opinion publique contre le projet d'oléoduc, c'est parce qu'ils ont réussi à en faire un symbole du laxisme d'Ottawa. La seule façon de répondre, c'est en démontrant que cette fois, enfin, l'avertissement de la Maison-Blanche a été entendu.

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