Tout le monde s'entend sur l'urgence de relier l'aéroport Trudeau au centre-ville de manière rapide et efficace. Et pourtant, deux ans après que le gouvernement Charest eut choisi une desserte par navette ferroviaire, le projet n'avance pas. Pire, il semble reculer.

En mars 2010, pourtant, c'est avec enthousiasme que le ministre Bachand jetait son dévolu sur le projet piloté par Aéroport de Montréal. Il s'engageait alors à assumer le tiers de la facture, à condition que ADM et Ottawa en fassent autant.

Depuis, c'est le silence radio au fédéral. Le dossier a certes été transféré à l'agence PPP Canada, un passage obligé, mais il n'a fait l'objet d'aucun appui politique, d'aucune annonce, pas même d'une intention sous-entendue. Il serait sur une voie de garage que cela ne surprendrait pas...

Il faut dire que le projet a été miné par deux importants irritants au cours de la dernière année. D'abord, Québec refuse toujours de dévoiler l'unique étude de faisabilité, demandée depuis un an par le député péquiste Nicolas Girard. Or ce rapport de la firme PricewaterhouseCoopers, pour ce que l'on en sait, est défavorable à l'«Aérotrain» en raison d'un piètre ratio coûts-bénéfices: trop cher pour le faible nombre de passagers.

Ensuite, le seul autre projet nord-américain de navette exclusive entre l'aéroport et le centre-ville est mort-né, l'an dernier. Toronto a en effet abandonné l'idée d'un lien ferroviaire dédié exclusivement aux voyageurs, comme Chicago et New York avant elle, faute de rentabilité. Comme partout ailleurs sur le continent, elle a choisi d'intégrer la navette à son réseau de transport local.

Difficile, dans un marché restreint comme Montréal, de reprocher aux conservateurs de ne pas se lancer aveuglément dans une telle aventure. Difficile aussi de croire qu'ils le feront dans un avenir prévisible, ce qui a pour effet de prolonger le statu quo de façon indue.

Entendons-nous, le projet d'ADM n'est pas mort, mais il n'est, manifestement, pas fort. Et il ne se relèvera pas tant et aussi longtemps que l'étude de PWC, originale ou mise à jour, ne sera pas rendue publique. Après le gâchis du Train de l'Est, il est impensable d'avancer à vue dans pareil projet (évalué à 600 M$), surtout que parallèlement, une nouvelle ligne de train de banlieue est prévue pour desservir l'Ouest-de-l'Île (676 M$).

Il importe donc de (re) mettre cartes sur table, toutes les cartes. Celle de la navette exclusive. Celle d'un possible lien rapide par autobus sur la voie réservée prévue sur l'autoroute 20. Et celle du Train de l'Ouest, un projet hybride desservant à la fois la banlieue ET l'aéroport proposé par l'Agence métropolitaine de transport à un coût moindre que les deux projets distincts (874 M$ plutôt que 1,2 milliard$).

L'impatience des Montréalais est compréhensible, mais l'importance des enjeux commande néanmoins un regard nouveau et en profondeur sur cette navette. Quitte à l'abandonner.

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