Mine de rien, pendant que le monde regardait ailleurs, le débat entourant le réchauffement planétaire est entré dans une ère post-climategate, comme le démontre le dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur le climat (GIEC).

Pendant que la communauté internationale tournait toute son attention vers l'économie, que les subprimes remplaçaient le CO2 et que les dettes publiques se faisaient plus menaçantes que la montée des eaux, l'enjeu climatique en profitait pour se repositionner au centre, loin des extrêmes entre lesquels il a été ballotté.

La première décennie des années 2000 a été marquée, en effet, par une polarisation du débat entre, d'un côté, les climato-sceptiques qui ont tout fait pour miner la science, et de l'autre, chercheurs et écolos qui, en bon nombre, ont poussé l'alarmisme aux confins de la rigueur scientifique.

Puis est survenu le climategate, à la fin 2009, ce «scandale» provoqué par le piratage des courriels de chercheurs britanniques et américains. Suivi par les révélations embarrassantes sur le GIEC, qui a reconnu certaines «erreurs regrettables» dans ses études.

La poussière aujourd'hui retombée, les scientifiques ont clairement tiré des leçons de ces histoires. Le «rapport spécial» sur les phénomènes extrêmes, dont un résumé a été rendu public vendredi, est un document tout en nuances qui met l'accent sur les doutes, incertitudes et désaccords de la communauté scientifique. Une humilité salutaire à 10 jours du début des négociations sur le climat, en Afrique du Sud.

Les chercheurs réitèrent la conclusion toujours aussi inébranlable sur l'existence des changements climatiques (l'homme émet du CO2, la planète se réchauffe), puis ils étayent les hypothèses les plus récentes sur leurs conséquences.

Ils constatent «avec un degré de confiance élevé» que l'accroissement des concentrations de gaz à effet de serre a provoqué une hausse des maxima et minima de température dans le monde. Ils prévoient, avec autant de certitude, que les jours de canicule deviendront plus chauds et fréquents avec le temps.

Mais ce n'est qu'avec un «degré de confiance moyen», en raison d'études contradictoires, qu'ils font un lien entre ces émissions et la recrudescence de phénomènes extrêmes (sécheresses, inondations, etc). Et ils reconnaissent que les prévisions à long terme concernant l'intensité et la fréquence des cyclones n'offrent qu'un «degré de confiance faible».

Les plus sceptiques s'empareront fort probablement de ces données pour torpiller plus encore la science (on peut l'affirmer avec un «degré de confiance très élevé»), mais cela ne doit pas ébranler le GIEC, qui a tout à gagner à jouer de rigueur, d'objectivité et de prudence.

D'autant que les plus récents livres écrits sur le sujet démontrent, eux aussi, que le débat public s'est recentré. Les auteurs, le philosophe Pascal Bruckner et le politologue Bruno Tertrais en tête, ne pourfendent plus autant l'existence du dérèglement climatique que l'alarmisme et le catastrophisme qu'il attise. Précisément ce qu'évite le dernier rapport du GIEC, avec raison.

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