Sur la base d'une dénonciation anonyme, l'administration de Montréal s'est permis d'espionner celui-là même qui a pour mandat de la surveiller. Pendant 10 mois, elle a scruté chacun de ses courriels, ouvert ses pièces jointes, violé la confidentialité de ses échanges.

Sur la base d'une dénonciation anonyme, l'administration de Montréal s'est permis d'espionner celui-là même qui a pour mandat de la surveiller. Pendant 10 mois, elle a scruté chacun de ses courriels, ouvert ses pièces jointes, violé la confidentialité de ses échanges.

Bref, elle s'est livrée à une attaque indécente et immorale contre l'un des piliers de la démocratie municipale, le Bureau du vérificateur général.

Cette histoire de filature aux plus hauts échelons dépasse en effet l'homme qui en a été victime, Jacques Bergeron. Il n'est pas ici question d'un simple employé surveillé par son employeur, mais bien d'une institution vitale attaquée dans ce qu'elle a de plus précieux, son indépendance.

Jacques Bergeron a-t-il mis sa belle-soeur à forfait? A-t-il tenté de contourner un appel d'offres? Peut-être. Mais ce n'est certainement pas à l'administration, en guerre ouverte contre celui qui fait l'objet des allégations, de fouiller la chose!

De la même façon qu'un dossier litigieux concernant le SPVM doit être transmis à la SQ, la Ville aurait dû transmettre la dénonciation à une instance indépendante, que ce soit le président du conseil municipal ou le ministre des Affaires municipales.

Que la Loi sur les cités et villes l'interdise ou pas n'y change rien, l'administration ne peut surveiller son surveillant sans se placer en conflit d'intérêts, sans devenir juge et partie. Surtout que le vérificateur ne relève ni de la Ville ni du maire, pas plus que du service du contrôleur général, cette instance relevant du directeur général d'où émane la filature virtuelle.

Le vérificateur est en effet nommé par le conseil municipal, aux deux tiers des voix, une soupape qui sert précisément à assurer son indépendance. Quand cette soupape saute, c'est la pertinence même du vérificateur qui saute.

Qu'en pensent le maire et le directeur général, Louis Roquet? Impossible de le savoir. Malgré la gravité du geste posé, les deux hommes se sont enfermés dans un mutisme injustifiable, hier, prétendant ne rien savoir de cette histoire d'espionnage.

Soit. Mais qu'ils nous disent publiquement ce qu'ils en pensent, qu'ils répondent aux accusations de vendetta politique de l'opposition, qu'ils se dissocient de cette méthode d'enquête disgracieuse et totalement démesurée par rapport aux faits reprochés. Louis Roquet doit en outre nous expliquer comment un employé techniquement sous sa gouverne, Pierre Reid, a pu initier une telle chose, comment il a pu avoir recours à d'indispensables ressources informatiques, comment il a pu installer une caméra devant le bureau du vérificateur et comment il a pu mener cette infiltration pendant tout près d'un an... sans jamais mettre son patron au courant.

De deux choses l'une: ou bien Pierre Reid a agi seul et doit être congédié, ou bien il a mis Louis Roquet dans le coup, auquel cas c'est ce dernier qui doit démissionner.

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