Main dans la main, les pétrolières et les constructeurs automobiles ont tué la voiture électrique il y a 10 ans. Du moins, voilà ce que répètent les amateurs de complots ayant visionné le documentaire Who Killed the Electrical Car.

Mais dans les faits, ce sont plutôt les consommateurs qui ont asséné le coup fatal à la fameuse EV1, la voiture électrique abandonnée par GM en 2001.

Il importe de remettre les pendules à l'heure si on veut cerner les réelles chances de succès de GM, qui tâte à nouveau ce marché avec la Volt, un modèle hybride branchable pour lequel l'entreprise a commencé à prendre les commandes cette semaine.

Plusieurs s'imaginent que les automobilistes font le pied de grue devant les portes des concessionnaires depuis 10 ans, en attente d'un modèle fiable et peu polluant qui leur permettra enfin de se déplacer sans nuire à l'environnement. C'est le discours notamment d'Ernst&Young, qui évaluait le mois dernier le potentiel mondial de ventes à 50 millions d'autos électriques...

Mais la réalité n'est pas aussi verte. Les automobilistes affirment peut-être vouloir se procurer un tel véhicule lorsqu'ils répondent aux sondeurs de la firme de consultants, ils optent néanmoins pour le bon vieux modèle thermique une fois chez le concessionnaire.

Habitués aux voitures qui ne nécessitent qu'un arrêt sporadique à la station-service, les consommateurs rechignent à l'idée d'acheter une auto qu'il faut brancher, qui a une autonomie limitée, qui colporte bien des préjugés (la batterie n'est pas fiable, l'hybride en hiver ne vaut rien, etc.). Et surtout, qui coûte plus cher que sa version classique.

«Nous avons acheté 16 millions de véhicules au cours de la dernière décennie dont moins de 100 000 étaient hybrides», résume l'analyste canadien Dennis DesRosiers. D'où l'abandon, faute de marché, de la EV1. D'où l'avenir incertain de la Volt.

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Convenons-en, le coût de l'essence n'est tout simplement pas assez élevé pour faire de l'auto à faible émission un choix sensé pour les consommateurs, qui n'ont qu'un souci relatif pour l'environnement. Ils n'opteront pour un modèle peu polluant qu'une fois le prix à la pompe assez élevé pour profiter d'un bon rendement de leur investissement.

Or, à 1$ le litre, la Prius à 30 000$ est un choix douteux sur le plan budgétaire. Encore plus la Volt à 41 000$.

Les ventes au Canada le confirment. Après un engouement temporaire pour les véhicules verts, les consommateurs profitent de la stabilité du cours du pétrole, depuis janvier, pour revenir à leurs habitudes énergivores.

Les crédits d'impôt à l'achat, comme ceux qu'offrent les États-Unis, le Québec et l'Ontario (mais pas Ottawa), peuvent aider à convertir certains automobilistes. Mais pour que ceux-ci se multiplient, il faudra une taxe sur le carbone ou une hausse majeure et à long terme du prix de l'essence.

Dans le cas contraire, la Volt et ses concurrentes demeureront l'apanage des plus verts... ou des plus riches.

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