Les Québécois inscrits au fameux guichet d'accès à un médecin de famille (GAMF) ne devraient pas s'y fier aveuglément parce que les médecins, eux, recrutent encore une bonne part de leur clientèle ailleurs.

Le GAMF est loin d'être une voie unique, et le ministère de la Santé devrait le souligner avec plus d'insistance sur la page d'inscription. Il y a bien des mentions sur la durée de l'attente, imprévisible. Et sur le fait que « vous pouvez aussi essayer de chercher vous-même ». Mais une véritable mise en garde s'impose. Le terme « guichet unique » donne l'impression qu'on peut s'en remettre à ce service. C'est loin d'être le cas.

Près de 475 000 noms y figuraient à la fin juin. Et ça n'a pas dû baisser beaucoup depuis. Parmi les médecins les plus susceptibles de prendre de nouveaux patients (ceux qui en ont moins de 1000), à peine plus de 13 % ont utilisé le service, montrent les données du Ministère au 16 septembre.

À la décharge des médecins, ce système mis en service par le Ministère au début avril leur a posé plusieurs problèmes au début. Assez pour que le mot se passe et qu'ils se trouvent des patients autrement - ce n'est pas ce qui manque.

Et à la décharge du Ministère, ce guichet unique a réglé des problèmes de l'ancien réseau de guichets d'accès aux clientèles orphelines (GACO), qui avait été vivement critiqué. De nouveaux correctifs seront d'ailleurs apportés sous peu.

N'empêche, il est frustrant de voir un autre système informatique gouvernemental éprouver de tels ratés. En particulier pour les patients orphelins qui avaient repris espoir à l'annonce d'une « fluidité des références » et d'une « capacité de répondre efficacement aux demandes » améliorées.

En fait, on ne sait même pas si ce guichet unique est le moyen le plus rapide de se trouver un médecin.

Dans l'année précédant sa création, sous l'ancien régime des guichets régionaux, à peine plus de la moitié des patients vulnérables ayant obtenu un médecin de famille ont été dirigés de la sorte, montrent les chiffres fournis par la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ). Il n'existe pas de données pour les patients non vulnérables, mais ce sont eux qui ont le plus intérêt à chercher par eux-mêmes, car le système de référence priorise les patients vulnérables. C'est justifié, mais pouvoir s'adresser à un professionnel de la santé qui nous connaît quand on est malade, c'est souhaitable pour tous.

Avec les nouveaux diplômés qui auront besoin de se bâtir une clientèle, et les médecins établis qui doivent inscrire au moins 500 patients pour toucher la pleine rémunération, le guichet pourrait gagner en popularité. L'idéal, toutefois, serait d'en faire un véritable objectif.

L'idée commence à faire son chemin, tant du côté de la FMOQ que du Ministère. La cible officielle, on le sait, exige qu'au moins 85 % de la population ait un médecin de famille d'ici la fin 2017. Cependant, elle paraît de plus en plus difficile à atteindre. Si le guichet se vide, par contre, on pourra présumer que tous les Québécois désireux d'avoir un médecin en ont un, et que l'objectif sera atteint.

Ce scénario est d'ailleurs inscrit en filigrane dans l'entente entre Québec et la FMOQ : si tous les patients vulnérables du guichet obtenaient un médecin en moins d'un mois (et les autres en moins de trois mois), la cible de 85 % pourrait être revue à la baisse.

La profession a donc tout intérêt à recruter des patients du guichet pour éviter le couperet de la loi 20. Avec près de 475 000 personnes en attente, toutefois, on n'est pas près d'arriver en bas de la liste.

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