L'embonpoint et l'obésité ont fait un retour dans l'actualité cette semaine grâce aux recommandations audacieuses d'un rapport fédéral. C'est un bon début, mais pour inverser la tendance, il faudrait s'attaquer à de multiples facteurs de front. Sommes-nous prêts à en faire une priorité ?

Si les termes « Sénat » et « rafraîchissant » ne vous semblent pas pouvoir cohabiter dans la même phrase, il faut lire le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur l'obésité au Canada. Rédigé dans un style très digeste, le document réclame des changements qui, dans l'état actuel des choses, font figure de révolutions.

- Revoir le Guide alimentaire canadien de fond en comble et exclure l'industrie agroalimentaire du processus ;

- Restreindre l'utilisation des allégations nutritionnelles, et repenser l'étiquetage en s'inspirant de ce qui se fait ailleurs ;

- Créer une nouvelle taxe sur les boissons sucrées, y compris celles contenant des édulcorants de synthèse ;

- Interdire la publicité alimentaire aux enfants dans tout le pays.

Ces propositions se défendent. Elles ne suffiront cependant pas à réduire le pourcentage de Canadiens qui présentent de l'embonpoint ou de l'obésité.

Le guide alimentaire de 2007 est dépassé, c'est vrai, mais ce document de référence n'a pas le pouvoir de faire engraisser ou maigrir la population. Le comité le reconnaît lui-même, une grande partie des enfants et des adultes ne suivent pas ses recommandations.

Une taxe sur les boissons sucrées permettrait de récolter des fonds pour financer des mesures favorables à la santé. Son effet dissuasif est cependant loin d'être garanti. Et même si une telle taxe en convainquait certains de réduire leur consommation, ça ne serait sans doute pas assez pour réduire la prévalence du surpoids à l'échelle de la population.

La disparition de la publicité alimentaire destinée aux enfants ne serait effectivement pas une perte. Le Québec interdit de cibler les moins de 13 ans pour quelque produit que ce soit depuis une trentaine d'années, et les enfants ne s'en portent pas plus mal. Mais ils n'affichent pas tous un poids santé pour autant, tant s'en faut.

L'obésité et le surpoids sont d'intérêt public parce qu'ils augmentent la probabilité de souffrir d'une foule de problèmes de santé dont le diabète de type 2, l'hypertension et plusieurs types de cancers. Si l'on veut en réduire l'impact sur le système de santé, il faut inverser la tendance. Or, celle-ci a de multiples causes.

On sait par exemple que les femmes ayant un statut socio-économique moins élevé sont les plus touchées par l'obésité. Les moins nantis n'ont souvent pas les moyens d'acheter les aliments frais et nourrissants en vedette dans les messages d'intérêt public. Ces denrées sont également inabordables pour beaucoup d'autochtones vivant dans les réserves éloignées.

Le comité sénatorial a fait des recommanda-tions à ce sujet, mais seront-elles entendues ?

Inciter la population à réduire sa consommation d'aliments surtransformés, c'est important. Encourager les transports et les loisirs actifs aussi. Aménager l'espace public pour faciliter les choses, c'est encore mieux. Mais si on veut enregistrer des gains mesurables, il ne faut pas seulement essayer de convaincre les gens de faire de meilleurs choix. Il faut aussi s'occuper de ceux qui ont des choix limités, ou inexistants, et leur donner des moyens de vivre autrement.

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