Le secteur canadien de l'énergie est frappé plus durement que prévu, et les industries censées profiter de la chute des prix du pétrole tardent à se manifester. Elles prendront plutôt le relais en deuxième moitié d'année, pense la Banque du Canada. Nous avons tous intérêt à ce qu'elle ait vu juste - le gouvernement Harper plus que quiconque.

L'exploitation pétrolière et gazière a beau ne représenter que 10 % de notre économie, elle fait tache d'huile. Ses investissements vont fondre de 40 % cette année, prévoit maintenant la Banque - encore pire que les 30 % d'abord envisagés. Et c'est sans compter les répercussions sur les autres entreprises au service de l'industrie.

Le ralentissement de la demande chinoise pesant sur les cours de plusieurs autres matières premières, les secteurs hors ressources sont vus comme la principale planche de salut. Malheureusement, la vigueur espérée durant la première moitié de l'année se fait toujours attendre.

Au lieu de la modeste croissance attendue, l'économie s'est contractée de 0,6 % de janvier à mars, puis de 0,5 % entre avril et juin, pense aujourd'hui la Banque. Autrement dit, le pays était techniquement en récession. Le gouverneur Stephen Poloz a soigneusement évité le terme en public. Sa réduction d'un quart de point du taux directeur, la deuxième de l'année après plus de quatre ans de stabilité, ne laisse toutefois planer aucun doute. La Banque juge la situation assez préoccupante pour risquer d'aggraver l'endettement des ménages, qu'elle dénonce pourtant depuis des années, et la surchauffe immobilière de régions comme Toronto et Vancouver.

Les institutions financières n'ayant retransmis qu'une partie de la baisse dans leur taux préférentiel, l'effet le plus notable pourrait bien être sur le dollar. La banque centrale table sur une moyenne de 80 cents US, mais l'annonce de jeudi a précipité le huard au bord des 77 cents.

Si les vacanciers en partance pour les États-Unis ne la trouvent pas drôle, cette dépréciation pourrait s'avérer très avantageuse pour les entreprises exportatrices.

Déjà, des catégories historiquement plus sensibles au taux de change, comme les matériaux de construction et d'emballage, les meubles, les vêtements et produits textiles ainsi que les grands véhicules automobiles, affichent un regain d'activité, signale la Banque. Le Canada serait donc bien placé pour profiter du dynamisme de son principal client, les États-Unis, et retrouver le chemin de la croissance dès le trimestre en cours.

Le résultat final sera cependant bien modeste : 1,1 % pour l'ensemble de l'année, selon la Banque. C'est bien en deçà des 2 % de croissance sur lesquels s'appuie le retour à l'équilibre budgétaire promis dans le dernier budget fédéral. Le gouvernement Harper, pourtant, n'en démord pas. Les ministres interrogés en précampagne électorale estivale continuent à nier toute possibilité de récession, même passagère, même déjà passée.

Le déni ne pourra durer éternellement. Les données de Statistique Canada pour le deuxième trimestre, qui devraient confirmer la contraction, paraîtront le 1er septembre. Les élus conservateurs ont donc jusqu'à la fête du Travail pour trouver une réponse intelligente. Ils devraient se croiser les doigts pour que l'économie donne des signes de reprise d'ici là : ça leur faciliterait grandement la tâche.

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