Les ministres Leitao et Coiteux ont beau parler de jeunesse, de prospérité et de croissance, leur retour à l'équilibre budgétaire ressemble davantage à la fin d'une époque qu'au début d'une ère nouvelle. Il va falloir se faire à l'idée: l'État québécois n'a pas les moyens de vendre du rêve.

Officiellement, les mesures annoncées jeudi ne représentent que 16% de l'effort requis. La première moitié figurait déjà dans le budget de juin dernier, l'autre 34% a été annoncé dans la mise à jour de décembre. Mais dans les faits, les impacts s'additionneront durant l'année à venir. Le citoyen découvrira les effets des restrictions au fil de ses contacts avec les services publics. Et les allègements promis en échange n'ont rien pour le tenir en haleine.

Ils ne commenceront pas à se matérialiser pas avant le prochain exercice, et s'étaleront sur quatre ans. Le plus visible, l'abolition de la taxe santé, profitera seulement aux revenus nets de 42 235$ ou moins la première année, qui récupèreront un maximum de 100$.

Les deux autres principaux allègements sont réservées à des catégories particulières: le bouclier fiscal vise les ménages plus modestes qui augmentent leurs revenus de travail; l'élargissement du crédit d'impôt pour travailleurs d'expérience aux personnes d'au moins 63 ans qui gagnent plus de 5000$ de revenus admissibles. Des incitatifs, donc, mais pas de cadeaux. Le Québécois moyen ne se sentira pas plus riche avec le déficit zéro.

Les rêves de prospérité sont en quelque sorte transférés au secteur privé. En annonçant, entre autres, une réduction du taux d'imposition général des entreprises, le rétablissant une partie des crédits d'impôts amputés au dernier budget et davantage d'allègements aux PME, le ministre Leitao fait le pari que les employeurs prendront le relai.

On ne lui souhaite pas de se tromper, mais la tendance n'est guère encourageante. Même profitables, même avec des conditions de crédit favorables, les entreprises hésitent à investir. Et même les efforts des gouvernements pourraient ne pas venir à bout de cet attentisme, reconnaît le ministre dans son budget. Ses prévisions de création d'emplois (37 000 en 2015, 35 600 en 2016) paraissent d'ailleurs bien optimistes comparées à celles de Desjardins (25 000 et 20 000).

Une fiscalité plus favorable n'est jamais de refus, mais il faudra davantage. La reprise américaine, couplée à la faiblesse de notre devise, a plus de chances convaincre les manufacturiers de passer en vitesse supérieure.

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Comme on le voit dans notre dossier spécial publié dans La Presse+, les rêves des Québécois sont riches et diversifiés. Et ceux-ci sont conscients des efforts à faire pour les réaliser. Les politiciens devraient en prendre note. Avec un tel état d'esprit, et le pénible retour à la réalité des finances publiques, leurs rêves à crédit risquent d'être accueillis avec beaucoup plus de scepticisme.

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