Près de 10 ans après le jugement de la Cour suprême sur les délais d'attente au Québec, un procès similaire se prépare en Colombie-Britannique. Et cette fois, ses effets pourraient se faire sentir dans l'ensemble du pays.

La souffrance et les risques infligés par les délais inhérents à certaines chirurgies constituent une atteinte au droit à la vie et à l'intégrité prévu à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, et l'interdiction de s'assurer au privé est démesurée, avait tranché le plus haut tribunal du pays en 2005.

La réponse de l'État avait cependant été très circonscrite. Trois interventions (remplacement du genou et de la hanche, et chirurgies pour la cataracte) feraient désormais l'objet d'une sorte de garantie de service, elles seules pourraient être assurées au privé.

Si le jugement Chaoulli a eu l'effet d'une déflagration, la poussière est vite retombée. Pour la majorité des patients, il n'a rien changé.

Le recours entamé dans l'Ouest est donc toujours d'actualité. Les situations dénoncées sont aberrantes. Trois ans pour réparer un genou. Dix-huit mois pour voir le chirurgien orthopédiste qui vous mettra sur sa liste d'attente. Un cancer du côlon et du foie dépistés au privé. Une maladie dégénérative ayant tellement progressé que l'opération (finalement offerte par les Shriners aux États-Unis) n'a pu éviter la chaise roulante au patient. Le Dr Brian Day, cofondateur d'un centre de chirurgie privée et ardent défenseur du privé en santé, est à l'origine de la poursuite.

En rendant les soins privés à peu près inaccessibles aux citoyens ordinaires alors que le système public ne les fournit pas, la législation provinciale contrevient à la Charte canadienne des droits et libertés, soutient la requête.

Le jugement, quel qu'il soit, ira en Cour suprême. Si celle-ci accepte de l'examiner, sa décision vaudra pour l'ensemble des provinces.

On ne peut présumer de rien. Dans Chaoulli, trois juges ont conclu que l'interdiction des assurances privées contrevenait de façon injustifiée à l'un des deux articles de la Charte canadienne visés dans le nouveau recours - l'article 7 sur le droit à la vie et à la sécurité. Trois autres juges ont dit le contraire.

Rappelons toutefois que d'autres décisions émanant de ce tribunal de la Colombie-Britannique ont ébranlé les colonnes du temple ces dernières années. Le jugement récent sur l'aide médicale à mourir ainsi que celui sur les sites d'injection supervisés s'appuyaient tous deux sur ce fameux article 7.

Cela dit, on ne sera pas fixé de sitôt. Le procès qui devait commencer au début du mois a été repoussé, et il s'annonce touffu.

En attendant, beaucoup de patients ne réussissent pas à être soignés dans des délais convenables, et en souffrent de multiples façons. Le système de santé idéal que les gouvernements prétendent défendre est une vue de l'esprit. Il est grand temps qu'ils l'admettent, au lieu d'essayer de nous faire croire que c'est le privé qui pose problème.

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