Si Québec veut augmenter les tarifs d'électricité, qu'il le dise franchement, et ne se cache pas derrière un prétexte vertueux comme l'efficacité énergétique.

Moduler les tarifs résidentiels d'Hydro-Québec, selon la taille des maisons par exemple, n'est pas dans les plans du gouvernement, a assuré le ministre des Ressources naturelles, mercredi. Tant mieux, parce que c'est une très mauvaise idée.

La controverse, rappelons-le, a débuté avec une réponse du ministre à l'Assemblée nationale, mardi. Ceux qui ont de grandes maisons, qui consomment beaucoup, pourraient avoir un tarif particulier, avait indiqué Pierre Arcand, en précisant que la proposition avait été faite par des experts dans une consultation sur l'efficacité énergétique.

N'empêche, il y avait de quoi s'interroger. D'autant, comme l'a fait ressortir le député péquiste Bernard Drainville, que le ministre a évoqué la tarification comme moyen d'influencer la consommation à quelques reprises récemment.

Présumer que la superficie habitable est directement proportionnelle à la «richesse» des propriétaires est une vision bien simpliste. Plusieurs autres facteurs entrent en jeu, dont les prix de l'immobilier dans chaque région et l'importance accordée à divers choix de vie (carrière, taille de la famille, loisirs, voyages, etc.). Des parents qui ont quatre enfants à loger méritent-ils des tarifs plus punitifs qu'un couple de globe-trotters qui se contente d'un pied-à-terre et dépense toutes ses économies à l'étranger?

De toute façon, les ménages les plus énergivores reçoivent déjà un signal de prix puisque toute l'électricité consommée au-delà des 30 premiers KWh par jour est frappée d'un tarif plus élevé. Cela les incite-t-il à réduire leur consommation? Il serait intéressant qu'Hydro fasse une étude sérieuse au cours des prochaines années parce qu'avec l'accumulation des hausses récentes et attendues, le signal de prix est devenu nettement plus audible.

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En même temps, plus des trois quarts de l'électricité consommée par les particuliers sert à chauffer l'espace et l'eau chaude. Évidemment, il y aurait moyen de combler ces besoins de façon moins énergivore. Aller chercher des gains d'efficacité majeurs requiert cependant des investissements. Or, les dépenses moyennes en électricité des ménages sont très comparables à leurs dépenses en alcool et tabac, a calculé Pierre-Olivier Pineau, professeur titulaire de la chaire en gestion du secteur de l'énergie à HEC Montréal. Si vous avez besoin de resserrer votre budget, vous trouverez sans doute plus facile de vous attaquer au second poste.

Pour améliorer l'efficacité énergétique, un signal de prix doit être soutenu par de l'information et des programmes, souligne le professeur Pineau.

Bref, si la seule chose qui intéresse Québec est d'augmenter ses revenus en haussant les tarifs d'électricité, qu'il le dise tout de suite. Parce que s'il veut vraiment aller chercher des gains d'efficacité dans le résidentiel, il va devoir développer une stratégie pas mal plus étoffée.

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