Un peu plus de transport en commun, de vélo et de marche et, surtout, beaucoup plus d'automobile. Le nouveau portrait des déplacements dans la région métropolitaine sonne le glas d'une certaine vision idéalisée du transport collectif. Il faut arrêter de mesurer son succès en fonction de son efficacité à déloger l'automobile.

La dernière Enquête Origine-Destination publiée il y a cinq ans avait suscité les espoirs les plus fous. Non seulement les transports en commun étaient en hausse, mais pour la première fois depuis le milieu des années 80, l'usage de l'auto avait reculé à l'heure de pointe du matin. La tendance était-elle en train de s'inverser? C'était oublier le contexte de l'enquête. L'automne 2008 a été marqué par la crise financière, la flambée des prix de l'essence et les bouchons de chantiers.

La nouvelle enquête réalisée à l'automne 2013 nous ramène à la tendance de fond des dernières décennies. Le parc automobile grossit deux fois plus vite que la population. Et l'augmentation des déplacements à l'heure de pointe se fait bien plus en auto qu'en transport collectif.

Faut-il s'en étonner? La population et l'emploi se développent de façon nettement plus marquée à l'extérieur de l'île, où l'auto est encore la règle plutôt que l'exception: on compte 6 véhicules pour 10 habitants à Laval et Longueuil, et 7 pour 10 dans les couronnes nord et sud. À Montréal, on se débrouille encore avec moins d'une auto pour deux habitants, mais ici aussi la flotte grossit plus vite que la population.

Résultat, les trajets matinaux en auto ont bondi de 15% dans l'ensemble de la région. Or, plus du tiers de ces déplacements servent à reconduire quelqu'un, très souvent des enfants. On n'a pas leur âge ni les explications des parents. Ce qui est sûr, par contre, c'est qu'on ne peut pas demander au transport public de prendre le relais demain matin.

La part de marché du transport collectif à l'heure de pointe stagne à 23% depuis la dernière enquête. Elle a progressé de 3 points seulement depuis 10 ans. C'est bien peu, compte tenu de l'argent investi dans le réseau. Mais est-ce la faute du transport collectif si le mode de vie des individus les amène à faire toujours plus de déplacements en auto? Est-ce son rôle de s'y substituer chaque fois? L'objectif paraît aussi vain qu'irréaliste.

Le transport collectif est, à plusieurs égards, la façon la plus intelligente de déplacer de grandes quantités de gens. Il ne contribue pas seulement à réduire les gaz à effet de serre, mais aussi la pollution urbaine, les accidents et l'usure des infrastructures routières. Il est donc essentiel de continuer à y investir. 

Le développement d'une offre de qualité fait toute la différence. Depuis cinq ans, le volume de déplacements a bondi de 28% à Laval alors qu'il n'a pas bougé dans l'Est. Tant mieux si une partie des usagers laissent leur auto à la maison. Ça ne devrait cependant pas être la seule, ni même la principale, mesure de la pertinence du transport en commun.

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