Les centres commerciaux n'auront aucun mal à attirer les foules aujourd'hui. Le reste de l'année, c'est une autre histoire. La popularité du commerce en ligne n'affecte pas que les détaillants, elle a aussi un impact sur ceux qui leur louent de l'espace.

Le phénomène est particulièrement frappant aux États-Unis. Des centres commerciaux à l'agonie ou carrément fermés, parfois rasés pour faire place à des tours résidentielles ou, ironiquement, occupés par des centres de traitement de données. D'ici 10 ans, environ 15 % des centres commerciaux américains auront mis la clé sous la porte ou auront une autre vocation que le commerce de détail, estime la firme de consultants en immobilier Green Street Advisors.

La situation est moins spectaculaire au Canada, mais le nombre de pieds carrés de magasin par habitant a quand même diminué de 8 % entre 2008 et 2012, a calculé le professeur de marketing Jacques Nantel, de HEC-Montréal. Et la baisse d'affluence se ressent ici aussi. Le vieillissement de la population et le peu de marge de manoeuvre des consommateurs (en particulier au Québec, où le pouvoir d'achat a reculé l'an dernier) n'aident pas non plus.

Certes, les ventes au détail ont augmenté de 3,6 % depuis un an - et c'était à la fin octobre, avant la lucrative période des Fêtes. Sauf qu'une partie de cette croissance est due aux ventes sur l'internet, donc à des achats qui ne se font pas en magasin.

Aux États-Unis, où l'on s'attend à ce que le commerce en ligne rafle plus de 8 % des ventes au détail d'octobre à décembre, les centres commerciaux font des pieds et des mains pour attirer de la clientèle. Cela va de la patinoire extérieure à des dons de charité en passant par l'emballage, la livraison ou le transport gratuits. Le service qui a cependant le plus de chances d'amener des consommateurs toute l'année est le centre de collecte, où ils récupèrent leurs achats... effectués sur l'internet. « Cela permet d'inviter les gens à aller au mail et à prendre note des promotions et de vraiment canaliser les achats », témoigne Marie-Andrée Boutin, vice-présidente immobilier du Groupe ALDO, qui compte près de 1400 points de vente en Amérique du Nord, dont 1000 aux États-Unis.

Ici, à part quelques SmartCentres qui testent la formule dans la région de Toronto, le service est surtout offert par des détaillants. Wal-Mart, par exemple, le fait dans une dizaine d'endroits en Ontario; ALDO dans de nombreux points de vente au pays. La manière a changé, mais l'idée est vieille comme le commerce : faire entrer le client en espérant qu'il soit tenté d'acheter.

Sears, Future Shop et Best Buy ont fermé des succursales au Canada; ils ne seront pas les derniers. Le paysage des centres commerciaux est appelé à changer, certains s'en tireront mieux que d'autres.

À terme, toutefois, la présence physique des magasins, qu'il soient dans un centre ou aient pignon sur rue, pourrait bien devenir leur principal avantage concurrentiel contre des commerces en ligne sans visage, comme Amazon. À condition, bien sûr, qu'ils soient capables de se réinventer et de devancer les attentes des consommateurs.

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