Améliorer l'accès, oui, mais avec un péage. C'est à cette condition, en créant plusieurs classes de patients, que Québec se décide enfin à offrir les services promis en pharmacie depuis des années. Décevant.

Le projet avait des allures d'autoroute périphérique. Une espèce de voie de contournement qui allait permettre aux patients d'arriver plus vite au but tout en réduisant la congestion dans les cliniques médicales et les urgences. Pour certains bobos ou besoins mineurs (infection urinaire, acide folique, feu sauvage, etc.), on pourrait obtenir une prescription directement du pharmacien au lieu d'aller poireauter dans une salle d'attente.

Tel un chantier asphalté, cet accès élargi a été promis et annoncé à maintes reprises.

Cette fois-ci semble être la bonne. Grâce au projet de loi déposé cette semaine, les pharmaciens pourront bientôt exiger des honoraires quand ils prescrivent un médicament pour une condition mineure connue ou ne nécessitant pas de diagnostic, et quand ils ajustent une ordonnance existante afin d'atteindre des cibles particulières (tension artérielle, glycémie, etc.). L'objectif est de rendre ces trois services accessibles en 2015.

Et contrairement à l'habitude, les coûts de ce chantier-là semblent relativement contrôlés. Mais à quel prix ! Ce nouvel accès aux soins sera frappé d'un péage dont la facture variera selon le client.

Les Québécois couverts par le régime d'assurance médicaments public auront droit aux honoraires négociés par le gouvernement. Ils seront couverts selon la même formule que les médicaments, donc soumis à la franchise et à la coassurance payable par le patient, sauf pour certaines catégories d'assurés qui n'ont rien à débourser.

Pour les Québécois assurés au privé, les honoraires seront à la discrétion du pharmacien, comme c'est le cas pour le prix des médicaments. Le pourcentage remboursé sera également à la discrétion de l'assureur.

Certains ne verront pas de problème à payer pour obtenir leurs médicaments plus vite. Mais quand des élus et des ordres professionnels promettent un meilleur accès aux soins de première ligne, la population est en droit de s'attendre à ce qu'il soit universel. D'autant que ces prescriptions demeureront sans frais pour les patients qui présenteront leur carte d'assurance maladie dans une clinique ou à l'urgence. Un service, plusieurs vitesses. Ce n'est pas nouveau au Québec. Que cela se fasse à l'initiative du gouvernement, toutefois, c'est une première. Il est décevant de voir l'équipe Couillard reprendre cette formule bancale et injuste mise de l'avant par l'administration péquiste à l'été 2013.

Pendant des années, pharmaciens et ministres de la Santé se sont vantés de leur initiative sans vouloir parler de son financement. On réalise à quel point l'accès promis sera étroit. Et on se demande si on verra la couleur des quatre autres services prévus par la loi, mais que les pharmaciens n'auront pas le droit de facturer.

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